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« Dictionnaire d'architecture de Viollet le Duc - cuisine » : différence entre les versions

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Aujourd’hui, nous sommes visiblement loin de ces temps barbares où l’on savait satisfaire aux besoins vulgaires de la vie ; dans nos châteaux et nos grands établissements publics, nous plaçons nos cuisines au rez-de-chaussée ou dans des caves, de façon à répandre dans le logis l’odeur nauséabonde qui s’échappe de ces officines ; ou bien, si nous les disposons dans des logis séparés, les règles de la bonne architecture veulent qu’elles occupent les communs, c’est-à-dire des ailes presque toujours éloignées du corps de logis principal, si bien qu’il faut apporter les mets à travers de longs couloirs, dans des barquettes, et que tout ce qui est servi sur table ne peut conserver qu’une fade tiédeur entretenue par des réchauds.
Aujourd’hui, nous sommes visiblement loin de ces temps barbares où l’on savait satisfaire aux besoins vulgaires de la vie ; dans nos châteaux et nos grands établissements publics, nous plaçons nos cuisines au rez-de-chaussée ou dans des caves, de façon à répandre dans le logis l’odeur nauséabonde qui s’échappe de ces officines ; ou bien, si nous les disposons dans des logis séparés, les règles de la bonne architecture veulent qu’elles occupent les communs, c’est-à-dire des ailes presque toujours éloignées du corps de logis principal, si bien qu’il faut apporter les mets à travers de longs couloirs, dans des barquettes, et que tout ce qui est servi sur table ne peut conserver qu’une fade tiédeur entretenue par des réchauds.


Les cuisines sont, pendant le moyen âge, dans les palais ou les monastères habités par un grand nombre de personnes, une construction importante ; c’est qu’en effet la cuisine compte bien pour quelque chose dans la vie de chaque jour. Les exemples que nous venons de présenter sont de véritables monuments, bien conçus, parfaitement exécutés ; on voit comme les architectes de ces bâtiments ont cherché à obtenir une circulation d’air très-active ; en effet, non-seulement l’air est nécessaire à l’entretien d’aussi grands foyers, mais il contribue encore à la qualité des aliments exposés à la cuisson. Le séjour de pareilles cuisines ne pouvait être malsain. Les architectes du XIIIe siècle devaient nécessairement perfectionner ces dépendances des monastères et des châteaux. Ils élevèrent des cuisines à plusieurs étages, ainsi que nous allons le voir tout à l’heure ; ils commencèrent à y installer des fourneaux, des tables chauffées pour dresser les mets avant de les servir ; ils eurent grand soin de disposer les dallages de façon à pouvoir les maintenir propres facilement ; quelquefois ils trouvèrent moyen d’utiliser la fumée de bois pour conserver certaines viandes.
Les cuisines sont, pendant le moyen âge, dans les palais ou les monastères habités par un grand nombre de personnes, une construction importante ; c’est qu’en effet la cuisine compte bien pour quelque chose dans la vie de chaque jour. Les exemples que nous venons de présenter sont de véritables monuments, bien conçus, parfaitement exécutés ; on voit comme les architectes de ces bâtiments ont cherché à obtenir une circulation d’air très-active ; en effet, non-seulement l’air est nécessaire à l’entretien d’aussi grands foyers, mais il contribue encore à la qualité des aliments exposés à la cuisson. Le séjour de pareilles cuisines ne pouvait être malsain. Les architectes du {{XIIIs}} devaient nécessairement perfectionner ces dépendances des monastères et des châteaux. Ils élevèrent des cuisines à plusieurs étages, ainsi que nous allons le voir tout à l’heure ; ils commencèrent à y installer des fourneaux, des tables chauffées pour dresser les mets avant de les servir ; ils eurent grand soin de disposer les dallages de façon à pouvoir les maintenir propres facilement ; quelquefois ils trouvèrent moyen d’utiliser la fumée de bois pour conserver certaines viandes.


Il existait, dans l’abbaye de Saint-Père ou Saint-Pierre de Chartres, une belle cuisine du XIIIe siècle qui touchait au réfectoire ; cette cuisine était circulaire et présentait, à l’intérieur, une disposition ingénieuse qui permettait de fumer une quantité considérable de viandes. Or, soit pour la consommation intérieure du couvent, soit pour vendre, les moines élevaient des troupeaux de porcs dont ils tiraient un produit, estimé des amateurs de lard salé et de jambons fumés. La grande cuisine de l’abbaye de Saint-Pierre de Chartres était disposée de manière à pouvoir fumer une quantité considérable de viandes.
Il existait, dans l’abbaye de Saint-Père ou Saint-Pierre de Chartres, une belle cuisine du {{XIIIs}} qui touchait au réfectoire ; cette cuisine était circulaire et présentait, à l’intérieur, une disposition ingénieuse qui permettait de fumer une quantité considérable de viandes. Or, soit pour la consommation intérieure du couvent, soit pour vendre, les moines élevaient des troupeaux de porcs dont ils tiraient un produit, estimé des amateurs de lard salé et de jambons fumés. La grande cuisine de l’abbaye de Saint-Pierre de Chartres était disposée de manière à pouvoir fumer une quantité considérable de viandes.


[[Fichier:Dictionnaire Viollet le Duc - 471 - cuisine abbaye Saint Pierre Chartres plan.png|center|400px|link=Dictionnaire d'architecture de Viollet le Duc - tome 4 page 472|alt=Illustration.]]
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[[Fichier:Dictionnaire Viollet le Duc - 475 - cuisine Palais de Justice Paris.png|center|400px|link=Dictionnaire d'architecture de Viollet le Duc - tome 4 page 475|alt=Illustration.]]
[[Fichier:Dictionnaire Viollet le Duc - 475 - cuisine Palais de Justice Paris.png|center|400px|link=Dictionnaire d'architecture de Viollet le Duc - tome 4 page 475|alt=Illustration.]]


On voit encore, dans les constructions anciennes du Palais-de-Justice de Paris, une salle voûtée sur un quinconce de colonnes ('''13'''), avec quatre larges cheminées aux angles. Cette salle, qui donne sur le quai du nord, à côté de la tour de l’Horloge, est connue sous le nom de cuisines de saint Louis. Cependant cette construction appartient à la fin du XIIIe siècle ou au commencement du XIVe, et est contemporaine des ouvrages élevés sous Philippe le Bel. Les manteaux des quatre cheminées forment, en projection horizontale, un angle obtus, et leur clef est contre-buttée par une façon d’étrésillon en pierre, ainsi que l’indique la fig. 14.
On voit encore, dans les constructions anciennes du Palais-de-Justice de Paris, une salle voûtée sur un quinconce de colonnes ('''13'''), avec quatre larges cheminées aux angles. Cette salle, qui donne sur le quai du nord, à côté de la tour de l’Horloge, est connue sous le nom de cuisines de saint Louis. Cependant cette construction appartient à la fin du {{XIIIs}} ou au commencement du XIVe, et est contemporaine des ouvrages élevés sous Philippe le Bel. Les manteaux des quatre cheminées forment, en projection horizontale, un angle obtus, et leur clef est contre-buttée par une façon d’étrésillon en pierre, ainsi que l’indique la fig. 14.


[[Fichier:Dictionnaire Viollet le Duc - 476 - cuisine Palais de Justice Paris 2.png|center|400px|link=Dictionnaire d'architecture de Viollet le Duc - tome 4 page 476|alt=Illustration.]]
[[Fichier:Dictionnaire Viollet le Duc - 476 - cuisine Palais de Justice Paris 2.png|center|400px|link=Dictionnaire d'architecture de Viollet le Duc - tome 4 page 476|alt=Illustration.]]