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== Origine == | == Origine == | ||
La légende attribue les premières utilisations de l'ardoise comme matériau de couverture à l'évêque d'Angers Licinius, en 592, devenu saint Lézin, patron des ardoisiers<ref>Aimé de Soland, ''Bulletin historique et monumental de l'Anjou'', | L'Anjou est propice à la production de pierre d'ardoise. Son usage y est ancien<ref name="anjouhistorique-janvier1909">''[[L'Anjou historique (revue) - janvier fevrier 1909 - page 373|L'Anjou historique]]'', janvier-février 1909, p. 373-376</ref>. La légende attribue les premières utilisations de l'ardoise comme matériau de couverture à l'évêque d'Angers Licinius, en 592, devenu saint Lézin, patron des ardoisiers<ref>Aimé de Soland, ''Bulletin historique et monumental de l'Anjou'', volume 6, Imprimerie Librairie Barassé, 1860</ref>. | ||
== L'exploitation == | == L'exploitation == | ||
[[Fichier:Le tour de la france par deux enfants 1904 p241 illustr2.jpg|right|thumb|upright=1.2|link=Le Tour de la France par deux enfants - Page 241|alt=Le Tour de la France par deux enfants - Illustration de la page 241.|{{citation|Ardoisiers d'Angers. — Quand les ardoises ont été arrachées de la carrière par gros blocs, on les fend au moyen de coins et de pics ; on obtient ainsi des feuilles de plus en plus minces. De nos jours, on a inventé une machine au moyen de laquelle on fend les ardoises avec rapidité.}} (G. Bruno, ''Le Tour de la France par deux enfants'', 1904)]] | [[Fichier:Le tour de la france par deux enfants 1904 p241 illustr2.jpg|right|thumb|upright=1.2|link=Le Tour de la France par deux enfants - Page 241|alt=Le Tour de la France par deux enfants - Illustration de la page 241.|{{citation|Ardoisiers d'Angers. — Quand les ardoises ont été arrachées de la carrière par gros blocs, on les fend au moyen de coins et de pics ; on obtient ainsi des feuilles de plus en plus minces. De nos jours, on a inventé une machine au moyen de laquelle on fend les ardoises avec rapidité.}} (G. Bruno, ''Le Tour de la France par deux enfants'', 1904)]] | ||
Aux portes d'[[Angers]], dès les {{XIe}}<ref name="nedelec-2010">Philippe et Catherine Nédélec, ''L'Anjou entre Loire et tuffeau'', Éditions Ouest-France, 2010</ref> et {{XIIs}}s les ardoisières sont à ciel ouvert<ref>P.Wagret J.Boussard J.Levron S. Mailliard-Bourdillon, ''Visages de l'Anjou'', Horizons de France, 1951, p. 40</ref>, mais l'exploitation reste embryonnaire, pour ne se développer qu'au {{XVs}}<ref name="nedelec-2010" />. À [[Trélazé]], c'est en 1406 que débute l'extraction d'ardoises à ciel ouvert<ref name="cport-1996-trelaze">Célestin Port, ''Dictionnaire historique géographique et biographique de Maine-et-Loire'', 1874-1878, | Aux portes d'[[Angers]], dès les {{XIe}}<ref name="nedelec-2010">Philippe et Catherine Nédélec, ''L'Anjou entre Loire et tuffeau'', Éditions Ouest-France, 2010</ref> et {{XIIs}}s les ardoisières sont à ciel ouvert<ref>P.Wagret J.Boussard J.Levron S. Mailliard-Bourdillon, ''Visages de l'Anjou'', Horizons de France, 1951, p. 40</ref>, mais l'exploitation reste embryonnaire, pour ne se développer qu'au {{XVs}}<ref name="nedelec-2010" />. À [[Trélazé]], c'est en 1406 que débute l'extraction d'ardoises à ciel ouvert<ref name="cport-1996-trelaze">Célestin Port, ''Dictionnaire historique géographique et biographique de Maine-et-Loire'', 1874-1878, édition révisée de 1996 par André Sarazin et Pascal Tellier, t. 4, p. 578 à 580</ref>. | ||
Jusqu'à la Révolution française, ce sont les communautés religieuses qui sont les principaux propriétaires des terrains ardoisiers<ref name="mairie-trelaze-15siecles">Ville de Trélazé, ''15 siècles d'histoire'', octobre 2013</ref | Au {{XVIIIs}}, les principaux centres de production se situent à Angers, Saint-Barthélemy-d'Anjou, Trélazé, La Pouëze et Combrée<ref name="mairie-trelaze-15siecles" />. Aux alentours d'Angers, on y fait mention des carrières des Carreaux (Trélazé), de la Noë (Trélazé), de Villechien (Trélazé), de la Paperie (Saint-Barthélemy), de Pigeon (Angers), du Bouillou, et de la Hacherie<ref name="anjouhistorique-janvier1909" />. Jusqu'à la Révolution française, ce sont les communautés religieuses qui sont les principaux propriétaires des terrains ardoisiers<ref name="mairie-trelaze-15siecles">Ville de Trélazé, ''15 siècles d'histoire'', octobre 2013</ref>. | ||
Plus tard, le développement industriel permet de s'enfoncer sous terre et de pouvoir intensifier la production. C'est le début du développement de l'extraction minière. | Plus tard, le développement industriel permet de s'enfoncer sous terre et de pouvoir intensifier la production. C'est le début du développement de l'extraction minière. | ||
Six carrières au début du {{XIXs}} fabriquent 50 millions d'ardoises, celle d'Avrillé, trois à Saint-Barthélémy-d'Anjou et deux à Trélazé<ref>Gérard Linden, ''Les mots des mines et carrières du Maine-et-Loire'', Éditions Cheminements, 2004, p. 34 et 25</ref>. | |||
Les grands exploitants se regroupent progressivement entre 1808 et 1891, donnant notamment naissance en janvier 1891 à la principale société d'extraction (85 % de la production), la société ''Commission des Ardoisières d'Angers''<ref name="cport-1996-trelaze" />{{,}}<ref name="ina11avril1964">Fresques Ina, ''L'histoire de l'ardoise à Trélazé'', 11 avril 1964</ref>{{,}}<ref name="nedelec-2010" />. | Les grands exploitants se regroupent progressivement entre 1808 et 1891, donnant notamment naissance en janvier 1891 à la principale société d'extraction (85 % de la production), la société ''Commission des Ardoisières d'Angers''<ref name="cport-1996-trelaze" />{{,}}<ref name="ina11avril1964">Fresques Ina, ''L'histoire de l'ardoise à Trélazé'', 11 avril 1964</ref>{{,}}<ref name="nedelec-2010" />. | ||
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Dans les années 1960, la mécanisation se développe, l'évolution des techniques permettant de rationaliser le travail du schiste ardoisier<ref name="ina11avril1964" />. Durant cette même période, la crise industrielle frappe les ardoisières<ref name="mairie-angers">Ville d'Angers, ''Parc des Ardoisières'', octobre 2013</ref>, cédant progressivement le pas à l'ardoise espagnole<ref name="ca-alm">CA Angers Loire Métropole, ''Trélazé - Quinze siècles d'histoire'', octobre 2013</ref>{{,}}<ref>Philippe Cayla, ''Aspects de la technologie minière en Anjou'', Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, t. 104, n° 3, 1997, p. 21</ref>. | Dans les années 1960, la mécanisation se développe, l'évolution des techniques permettant de rationaliser le travail du schiste ardoisier<ref name="ina11avril1964" />. Durant cette même période, la crise industrielle frappe les ardoisières<ref name="mairie-angers">Ville d'Angers, ''Parc des Ardoisières'', octobre 2013</ref>, cédant progressivement le pas à l'ardoise espagnole<ref name="ca-alm">CA Angers Loire Métropole, ''Trélazé - Quinze siècles d'histoire'', octobre 2013</ref>{{,}}<ref>Philippe Cayla, ''Aspects de la technologie minière en Anjou'', Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, t. 104, n° 3, 1997, p. 21</ref>. | ||
Entre 1983 et 1993, l'effectif de l'industrie ardoisière passe de {{formatnum:1700}} personnes à environ 500<ref name="mairie-trelaze-crise">Ville de Trélazé, ''De la crise au renouveau'', octobre 2013</ref>. À cette période | Entre 1983 et 1993, l'effectif de l'industrie ardoisière passe de {{formatnum:1700}} personnes à environ 500<ref name="mairie-trelaze-crise">Ville de Trélazé, ''De la crise au renouveau'', octobre 2013</ref>. À cette période les exploitations souterraines peuvent aller à plus de 400 mètres<ref name="bdf49">[http://ste.christine.49.free.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=99:anjou-ardoisieres&catid=3:region-descriptif&Itemid=69 Les ardoisières, ardoises d'Anjou], mars 2010</ref>. | ||
Fin 2013, l'entreprise angevine ''[[Ardoisières de Trélazé|Ardoisières d'Angers]]'' annonce sa fermeture, actée par le plan social de mars de l'année suivante. C'est la fin de l'exploitation ardoisière en Anjou<ref>Ouest-France Entreprises, ''Les Ardoisières, c'est bien fini'', 30 mars 2014</ref>. | Fin 2013, l'entreprise angevine ''[[Ardoisières de Trélazé|Ardoisières d'Angers]]'' annonce sa fermeture, actée par le plan social de mars de l'année suivante. C'est la fin de l'exploitation ardoisière en Anjou<ref>Ouest-France Entreprises, ''Les Ardoisières, c'est bien fini'', 30 mars 2014</ref>. | ||
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== Les ardoisiers == | == Les ardoisiers == | ||
[[Fichier:PetitCourrier-1911 11 12-ardoisieres.jpg|right|thumb|upright=1.2|link=Le Petit Courrier du 12 novembre 1911 - Ardoisières|alt=Article du Petit Courrier, 12 novembre 1911.|Article du Petit Courrier, 12 novembre 1911]] | [[Fichier:PetitCourrier-1911 11 12-ardoisieres.jpg|right|thumb|upright=1.2|link=Le Petit Courrier du 12 novembre 1911 - Ardoisières|alt=Article du Petit Courrier, 12 novembre 1911.|Article du Petit Courrier, 12 novembre 1911]] | ||
On appelait ceux qui descendaient dans les mines les ouvriers « [[à-bas|d'à-bas]] », et les fendeurs qui travaillaient en surface, les ouvriers « [[à-haut|d'à-haut]] »<ref>Société d'économie sociale - Unions de la paix sociale, ''La Réforme sociale'', Volume 39, 1900</ref>. | On appelait ceux qui descendaient dans les mines les ouvriers « [[à-bas|d'à-bas]] » (ouvrier d'en bas), et les fendeurs qui travaillaient en surface, les ouvriers « [[à-haut|d'à-haut]] » (ouvrier d'en haut)<ref>Société d'économie sociale - Unions de la paix sociale, ''La Réforme sociale'', Volume 39, 1900</ref>. | ||
Les manœuvres du fond ou les travailleurs journaliers formaient un sous-prolétariat au sein de la population des ardoisières. La misère de cette population la pousse aux revendications sociales. En 1790 les prix de l'alimentation provoquent une émeute<ref name="bdf49" />. | Les manœuvres du fond ou les travailleurs journaliers formaient un sous-prolétariat au sein de la population des ardoisières. La misère de cette population la pousse aux revendications sociales. En 1790 les prix de l'alimentation provoquent une émeute<ref name="bdf49" />. | ||
Les besoins de main d'œuvre étant importants, de nombreux Bretons affluent à Trélazé<ref>René Musset, ''Production, industrie, commerce de l'ardoise en France'', Annales de Géographie, 1937, t. 46, n° 260, pp. 174-178</ref> entre 1850 et 1930. C'est le cas par exemple en [[Le Petit Courrier (presse angevine)#Novembre 1911|novembre 1911]], où des Concarnois viendront pour descendre dans les puits<ref name="petitcourrier12nov11">''Le Petit Courrier'', parution du 12 novembre 1911, p. 1 et 3</ref>.<br /> | Les besoins de main d'œuvre étant importants, de nombreux Bretons affluent à Trélazé<ref>René Musset, ''Production, industrie, commerce de l'ardoise en France'', Annales de Géographie, 1937, t. 46, n° 260, pp. 174-178</ref> entre 1850 et 1930. C'est le cas par exemple en [[Le Petit Courrier (presse angevine)#Novembre 1911|novembre 1911]], où des Concarnois viendront pour descendre dans les puits<ref name="petitcourrier12nov11">''[[Le Petit Courrier (presse angevine)#Novembre 1911|Le Petit Courrier]]'', parution du 12 novembre 1911, p. 1 et 3</ref>.<br /> | ||
Les bretons passent de 20 % de la population trélazéenne en 1900, à 50 % en 1908<ref>C. Fauchet | Les bretons passent de 20 % de la population trélazéenne en 1900, à 50 % en 1908<ref>C. Fauchet et N. Hugues, ''La ville noire, terre de migrations bretonnes : Trélazé, 1850-1914'', dans les Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, tome 104, numéro 3, 1997, p. 201</ref>. | ||
À la fin du {{XIXs}}, le développement de l'industrie de l'ardoise entraîne l'essor du syndicalisme et les premières grèves. Une personnalité se distinguera au début du {{XXs}}, [[Ludovic Ménard]] (1855-1935), ouvrier fendeur et syndicaliste<ref name="dpv">M. Dreyfus - C.Pennetier - N. Viet-Depaule, ''Visages du mouvement ouvrier'', Éditions de l'Atelier, 1995, p. 12</ref>{{,}}<ref name="g-linden">Gérard Linden, ''Les mots des mines et carrières du Maine-et-Loire'', Éditions Cheminements, 2004, p. 168</ref>. En 1920, les ardoisiers sont assimilés aux mineurs<ref name="dpv" />{{,}}<ref name="g-linden" />. | À la fin du {{XIXs}}, le développement de l'industrie de l'ardoise entraîne l'essor du syndicalisme et les premières grèves. Une personnalité se distinguera au début du {{XXs}}, [[Ludovic Ménard]] (1855-1935), ouvrier fendeur et syndicaliste<ref name="dpv">M. Dreyfus - C.Pennetier - N. Viet-Depaule, ''Visages du mouvement ouvrier'', Éditions de l'Atelier, 1995, p. 12</ref>{{,}}<ref name="g-linden">Gérard Linden, ''Les mots des mines et carrières du Maine-et-Loire'', Éditions Cheminements, 2004, p. 168</ref>. En 1920, les ardoisiers sont assimilés aux mineurs<ref name="dpv" />{{,}}<ref name="g-linden" />. | ||
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== Cités ardoisières == | == Cités ardoisières == | ||
Le quart-nord-ouest du département est le pays du fer et de l'ardoise, sur une zone qui s'étend de ses limites occidentales (Pouancé, Freigné) vers son centre au nord de la Loire (Trélazé), avec une pointe au sud du fleuve vers Juigné-sur-Loire, Chaudefonds, Saint-Lambert<ref>Romain Brossé, ''Mines et carrières en Anjou : cadre géologique, modalités d'exploitation'', dans | Le quart-nord-ouest du département est le pays du fer et de l'ardoise, sur une zone qui s'étend de ses limites occidentales (Pouancé, Freigné) vers son centre au nord de la Loire (Trélazé), avec une pointe au sud du fleuve vers Juigné-sur-Loire, Chaudefonds, Saint-Lambert<ref>Romain Brossé, ''Mines et carrières en Anjou : cadre géologique, modalités d'exploitation'', dans les Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, tome 104, numéro 3, 1997, ''Mines, carrières et sociétés dans l'histoire de l'Ouest de la France'', textes réunis par Jean-Luc Marais, pp. 11-18</ref>. | ||
Il existait plusieurs centres ardoisiers : Avrillé, Châtelais, Combrée, Juigné-sur-Loire, Noyant-la-Gravoyère, Les Ponts-de-Cé, La Pouëze, Vern-d'Anjou et Trélazé en Maine-et-Loire, Congrier, Javron et Renazé en Mayenne, Grand-Auverné en Loire-Atlantique<ref>Julien Derouet, ''Paroles de mineurs d'ardoise'', Cheminements, 2009, p. 9</ref>. | Il existait plusieurs centres ardoisiers : Avrillé, Châtelais, Combrée, Juigné-sur-Loire, Noyant-la-Gravoyère, Les Ponts-de-Cé, La Pouëze, Vern-d'Anjou et Trélazé en Maine-et-Loire, Congrier, Javron et Renazé en Mayenne, Grand-Auverné en Loire-Atlantique<ref>Julien Derouet, ''Paroles de mineurs d'ardoise'', Cheminements, 2009, p. 9</ref>. | ||
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En Maine-et-Loire, deux musées sont dédiés à l'ardoise : | En Maine-et-Loire, deux musées sont dédiés à l'ardoise : | ||
* [[musée de l'ardoise de Trélazé]], | * [[Musée de l'ardoise de Trélazé|le musée de l'ardoise de Trélazé]], | ||
* [[la mine bleue de Noyant-la-Gravoyère]]. | * [[la mine bleue de Noyant-la-Gravoyère]]. | ||
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:* [[Mémoires de la Société académique - volume 18 - page 237|Mémoires de la Société académique - Les schistes en Maine-et-Loire (1865)]] | :* [[Mémoires de la Société académique - volume 18 - page 237|Mémoires de la Société académique - Les schistes en Maine-et-Loire (1865)]] | ||
:* [[Carte d'Alexis Boisnard (1874)|Carte générale des ardoisières d'Angers (1874)]] | :* [[Carte d'Alexis Boisnard (1874)|Carte générale des ardoisières d'Angers (1874)]] | ||
:* [[L'Anjou historique (revue) - janvier fevrier 1909|L'Anjou historique (1909)]] | :* [[L'Anjou historique (revue) - janvier fevrier 1909 - page 373|L'Anjou historique (1909)]] | ||
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