Julien Gracq

De Wiki-Anjou

Écrivain français, Julien Gracq, de son vrai nom Louis Poirier, est né le 27 juillet 1910 à Saint-Florent-le-Vieil (Maine-et-Loire) où il se retira avant de décéder le 22 décembre 2007 au CHU d'Angers.

Son premier roman, paru en décembre 1938, marque le début d’une belle romance d’une vingtaine d’ouvrages. C’est en 1951 que Julien Gracq acquiert sa notoriété, lorsqu’il refuse le prix Goncourt décerné à son roman Le Rivage des Syrtes.


L'écrivain

 
Littérature en Anjou.

Célèbre et méconnu : la formule s’applique parfaitement à Julien Gracq. Écrivain reconnu pour l’excellence de son style et la force d’évocation de sa prose, mais qui a vécu toute sa vie – près d’un siècle (1910-2007) – volontairement retranché derrière son œuvre et soucieux de ne pas mélanger les genres. Vie ordinaire d’un côté, et ce métier de professeur de lycée qu’il va exercer jusqu’à sa retraite, appliquée et discrète à l’image de son nom d’état-civil, lui-même très ordinaire : Louis Poirier, né sur les bords de la Loire, à Saint-Florent-le-Vieil. De l’autre, osera-t-on dire : la « vraie vie », c’est-à-dire l’aventure de l’écriture qu’il inaugure – à 27 ans- avec un premier récit hyper-romantique, Au château d’Argol, publié sous un pseudonyme déjà beaucoup plus singulier.

Ce premier livre signé Julien Gracq nous montre d’emblée la capacité de cet écrivain à nous transporter ailleurs par la magie des mots et des images que leur subtil agencement suscite sous sa plume. Ici, une Bretagne mythique que seuls de tels écrits permettent de retrouver. Et là, aux marches d’un Orient de légende qui n’attendait, depuis des siècles, qu’une occasion pour déferler sur Le Rivage des Syrtes. Cet envoûtant récit métaphorique sur la vie et la mort des civilisations vaudra à son auteur la gloire, en 1951, avec l’attribution du prix Goncourt…qu’il refuse.

Dissipons tout de suite le durable malentendu qui s’en suivit. Non ! Ce n’est pas par orgueil ni dédain que Julien Gracq refusa cette consécration, mais pour signifier à nouveau, dans le droit fil de son pamphlet publié un an plus tôt, La littérature à l’estomac, cette chose toute simple que trop de bruit autour des livres et de sordides marchandages autour des prix finissent pas faire perdre de vue : les livres sont d’abord faits… pour être lus. C’est là et nulle part ailleurs le lieu de la rencontre entre l’auteur et son lecteur, le seul qui rende vraiment possible la miraculeuse osmose entre l’acte d’écrire et le fait de lire. Prophétique cette dénonciation par Gracq des dérives médiatiques qui ont atteint depuis les sommets que l’on sait, et exemplaire son constant retrait des tréteaux. Revenons au livre, nous dit-il, et, après, mais après seulement, causons. Car, certes naturellement réservé, Gracq n’était cependant en rien misanthrope, opposant au « non » de Sartre le « oui » à la vie de Claudel. Un « oui » intégral qui, pour Gracq, fait de l’homme, dans sa présence au monde, une véritable « plante humaine ». Et sa porte, je puis en témoigner, était toujours ouverte, non pour de banales politesses mais de véritables échanges, que son visiteur soit écrivain connu (nombreux sont ceux qui ont fait le voyage à Saint-Florent) ou plus simple lecteur. Tous sincèrement gracophiles et non gracolâtres.

Gracq, infatigable lecteur (aimant Chateaubriand, Stendhal et Balzac, mais aussi Edgar Poe, André Breton, Ernst Junger et… Jules Verne) et grand promeneur (dans Nantes, au bord de la mer, à la campagne), nous fait partager dans ses essais et ses recueils, non sans humour et causticité le cas échéant, ses découvertes, ses impressions, ses admirations, ses suspicions. Lieux ou livres jalonnent ses fragments, où la description se fait pure poésie et la notation lumineuse.

Pour l’apprivoiser, il faut suggèrer à ceux qui ne l’auraient pas encore pratiqué, d’aborder cet auteur par ce qu’il a de plus abordable précisément : ses recueils de notes et de croquis : Lettrines 1 et 2, Carnets du grand chemin où l’on retrouvera l’essentiel des pages qu’il consacre à son pays natal et à ses souvenirs et impressions des bords de Loire, auxquels il faut ajouter Les Eaux étroites, où il évoque superbement une promenade faite jadis sur l’Èvre, la rivière des Mauges qui se jette dans la Loire juste au pied de Saint-Florent. Côté récits, commencez par Un balcon en forêt. Alors, vous verrez, le charme opérera de lui-même. Et l’ayant ainsi vérifié par vous-mêmes, vous pourrez, après tant d’autres, le confirmer : « Oui, Julien Gracq, maître du style et maître du paysage, analyste particulièrement intuitif et esprit libre, est bien un grand écrivain ! ».


Bibliographie

  • Au château d'Argol, Corti, 1938
  • Un beau ténébreux, Corti, 1945
  • Liberté grande, Corti, 1946
  • André Breton, quelques aspects de l'écrivain, Corti, 1948
  • Le Roi Pêcheur, Corti, 1948
  • La Littérature à l’estomac, Corti, 1950
  • Le Rivage des Syrtes, Corti, 1951
  • Prose pour l'étrangère, 1952 (Hors commerce)
  • Penthésilée, Corti, 1954 (traduction de l'oeuvre originale)
  • Un balcon en forêt, Corti, 1958
  • Préférences, Corti, 1961
  • Lettrines, Corti, 1967
  • La Presqu’île, Corti, 1970
  • Lettrines 2, Corti, 1974
  • Les Eaux étroites, Corti, 1976
  • En lisant en écrivant, Corti, 1981
  • La Forme d’une ville, Corti, 1985
  • Autour des sept collines, Corti, 1988
  • Carnets du grand chemin, Corti, 1992
  • Entretiens, Corti, 2002