Aller au contenu

« Le Maine-et-Loire au XIXe siècle » : différence entre les versions

Le Maine-et-Loire au XIXe siècle
m (Franck-fnba a déplacé la page Carte de Victor Levasseur vers Le Maine-et-Loire au XIXe siècle)
(Le Maine-et-Loire au XIXe siècle)
Ligne 1 : Ligne 1 :
Une carte du département de [[Maine-et-Loire]] publiée pour la première fois en 1847 par Victor Levasseur<ref>Victor Levasseur (1795-1862), ingénieur-géographe et géomètre attaché au génie du cadastre et de la ville de Paris, polytechnicien, membre de la Société de géographie ([http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb15369550q/PUBLIC notice BnF]).</ref> qui donne envie d'en apprendre un peu plus sur ses statistiques départementales et ses notices historiques, leur fiabilité notamment. Il sera instructif de comparer avec les statistiques de Jules Verne, trente ans plus tard, pendant la révolution industrielle, ou bien avec le style littéraire de Jules Michelet.
En 1847, Victor Levasseur publie une carte annotée du département de [[Maine-et-Loire]]. Trente ans plus tard, pendant la révolution industrielle, Jules Michelet et Jules Verne publient aussi des données.


== Texte de Victor Levasseur ==
[[Fichier:Carte maineetloire 1852 levasseur - texte 1.jpg|vignette|upright=1.5|alt=Détail de la carte de Victor Levasseur (Statistique).|Détail de la carte : Statistique]]


<big>STATISTIQUE</big><ref>Carte du département de Maine-et-Loire de Victor Levasseur, ''Atlas national illustré des 86 départements et des possessions de la France'', 1852.</ref>
== Carte de Victor Levasseur en 1852 ==
{{clr|left}}
Carte du département de [[Maine-et-Loire]] par Victor Levasseur publiée pour la première fois en 1847, comprenant des données sur les divisions administratives, le territoire, les personnalités, la production et le commerce<ref>Carte du département de Maine-et-Loire de Victor Levasseur, ''Atlas national illustré des 86 départements et des possessions de la France'', 1852 ([[Carte de Victor Levasseur|voir]]).</ref>.


'''DIVISION, ADMINISTRATION'''
=== Division, administration ===
[[Fichier:Carte maineetloire 1852 levasseur - texte 1.jpg|right|thumb|upright=1.5|link=Carte de Victor Levasseur|alt=Détail de la carte de 1852 de Victor Levasseur (Division et administration...).|Détail de la carte : Division et administration...]]


{{citation|
Le département de Maine et Loire est formé de l'ancienne province d'Anjou. Il est divisé en 5 arrondissements communaux<ref name="arrondissements">En 1852, les cinq arrondissements de l'époque sont Angers, Segré, Baugé, Saumur et Beaupréau (déplacé en 1857 à Cholet).</ref>, 34 cantons et 373 communes<ref>En 1852, Victor Levasseur énumère 5 arrondissements, 34 cantons et 373 communes. En 1861, P.-A. Millet de la Turtaudière indique 5 arrondissements, 34 cantons et 376 communes ([[Indicateur de Maine et Loire de Millet - tome 1 - page 18|voir]]). En 1889, E. Milon indique 5 arrondissements, 34 cantons et 381 communes ([[Notice sur Segré de Milon - page 10|voir]]).<br />Pour l'évolution du nombre de communes, voir [[Répertoire des communes et anciennes communes de Maine-et-Loire|le répertoire]].</ref>. Sa population est de 504.963 habitants sur une étendue de 718.807 hectares, ce qui donne 1088 habitants par lieue de poste carrée. Revenu des propriétés immobilières des communes 140,919 francs. Impôt foncier 2,537,544 francs. 14{{e}} Division militaire. 21{{e}} Arrondissement forestier. 14{{e}} inspection des Ponts et Chaussées. 6{{e}} Légion de Gendarmerie. Inspection Ouest du service des mines. Dépôt Nationale d'étalons à Angers. Cour d'Appel et académie d'Angers. Évêché à Angers suffragant de l'archevêché à Tours.
Le département de Maine et Loire est formé de l'ancienne province d'Anjou. Il est divisé en 5 arrondissements communaux<ref name="arrondissements">En 1852, les cinq arrondissements de l'époque sont Angers, Segré, Baugé, Saumur et Beaupréau (déplacé en 1857 à Cholet).</ref>, 34 cantons et 373 communes<ref>En 1852, Victor Levasseur énumère 5 arrondissements, 34 cantons et 373 communes. En 1861, P.-A. Millet de la Turtaudière indique 5 arrondissements, 34 cantons et 376 communes ([[Indicateur de Maine et Loire de Millet - tome 1 - page 18|voir]]). En 1889, E. Milon indique 5 arrondissements, 34 cantons et 381 communes ([[Notice sur Segré de Milon - page 10|voir]]).<br />Pour l'évolution du nombre de communes, voir [[Répertoire des communes et anciennes communes de Maine-et-Loire|le répertoire]].</ref>. Sa population est de 504.963 habitants sur une étendue de 718.807 hectares, ce qui donne 1088 habitants par lieue de poste carrée. Revenu des propriétés immobilières des communes 140,919 francs. Impôt foncier 2,537,544 francs. 14{{e}} Division militaire. 21{{e}} Arrondissement forestier. 14{{e}} inspection des Ponts et Chaussées. 6{{e}} Légion de Gendarmerie. Inspection Ouest du service des mines. Dépôt Nationale d'étalons à Angers. Cour d'Appel et académie d'Angers. Évêché à Angers suffragant de l'archevêché à Tours.
}}


'''ARRONDISSEMENTS COMMUNAUX'''
=== Arrondissements communaux ===
 
{| class="wikitable sortable"
{| class="wikitable sortable"
  |-
  |-
Ligne 28 : Ligne 28 :
  |}
  |}


Cinq Arrondissements<ref name="arrondissements" /> qui comptent 111.892 électeurs 11 représentants. Situation d'Angers 47° 28′ 17″ lattitude Nord 2° 53′ 34″ longitude occidentale. Population d'Angers 44,781 habitants. Distance de Paris à Angers par le Mans d'après l'administration des Postes 304 kilomètres (78 lieues de poste).
{{citation|
Cinq Arrondissements<ref name="arrondissements" /> qui comptent 111.892 électeurs 11 représentants. Situation d'Angers 47° 28′ 17″ l’attitude Nord 2° 53′ 34″ longitude occidentale. Population d'Angers 44,781 habitants. Distance de Paris à Angers par le Mans d'après l'administration des Postes 304 kilomètres (78 lieues de poste).
}}


'''TERRITOIRE'''
=== Territoire ===
 
{{citation|
Le département offre les différentes espèces de sol qui suivent :  
Le département offre les différentes espèces de sol qui suivent : 28,215 ha de sol riche terreau ; 97,590 ha de craie ; 6,031 ha de gravier ; 7,932 ha de sol pierreux ; 31,019 ha de sol sablonneux ; 270,134 ha de sol argileux ; 248,471 ha de différentes sortes.Les sols calcaires ne présentent qu'environ 600 ha de sol non cultivé ; tout le reste est très productif. Le surplus est consacré à l'agriculture, abstraction faite des bois, des lieux bâtis, des chemins, des cours de rivières.  
* 28,215 ha de sol riche terreau ;  
* 97,590 ha de craie ;  
* 6,031 ha de gravier ;  
* 7,932 ha de sol pierreux ;  
* 31,019 ha de sol sablonneux ;  
* 270,134 ha de sol argileux ;  
* 248,471 ha de différentes sortes.
* Les sols calcaires ne présentent qu'environ 600 ha de sol non cultivé ; tout le reste est très productif. Le surplus est consacré à l'agriculture, abstraction faite des bois, des lieux bâtis, des chemins, des cours de rivières.  


Mines de fer et de houille. Ardoisières. Marbres de toutes couleurs. Granit, pierre de taille, grès à paver. Eaux minérales au hameau de Joanette près de [[Martigné-Briand|Martigné Briand]].
Mines de fer et de houille. Ardoisières. Marbres de toutes couleurs. Granit, pierre de taille, grès à paver. Eaux minérales au hameau de Joanette près de [[Martigné-Briand|Martigné Briand]].
}}
{{clr}}


[[Fichier:Carte maineetloire 1852 levasseur - texte 2.jpg|vignette|upright=1.5|alt=Détail de la carte de Victor Levasseur (Curiosités).|Carte de Maine-et-Loire par Victor Levasseur : Curiosités, célébrités, économie et commerce.]]
=== Curiosités ===
'''CURIOSITÉS'''
[[Fichier:Carte maineetloire 1852 levasseur - texte 2.jpg|right|thumb|upright=1.5|link=Carte de Victor Levasseur|alt=Détail de la carte de 1852 de Victor Levasseur (Curiosités...).|Détail de la carte : Curiosités, célébrités, production et commerce.]]


* La Grotte au puits Giraud, commune de St Florent-le-Jeune.
{{citation|
* Des antiquités romaines aux environs de [[Chênehutte]], de Pont-de-Cé et de Saumur.
La Grotte au puits Giraud, commune de St Florent-le-Jeune. Des antiquités romaines aux environs de [[Chênehutte]], de Pont-de-Cé et de Saumur. La [[Cathédrale d'Angers|Cathédrale]] à Angers et son antique [[Château d'Angers|Château]]. Le camp de César près des [[Les Ponts-de-Cé|Ponts-de-Cé]]. Les ruines du château de [[Beaufort-en-Vallée|Beaufort]]. Dans la principale église de [[Saint-Florent-le-Vieil|St Florent]] le monument sculpté par David et élevé à la mémoire du brave général vendéen Bonchamp qui au moment de mourir sauva la vie de 8,000 prisonniers républicains. Le château et le pont de [[Saumur]] ; son [[Le Cadre noir|école de cavalerie]]. La maison de détention à [[Abbaye de Fontevraud|Fontevrault]].
* La [[Cathédrale d'Angers|Cathédrale]] à Angers et son antique [[Château d'Angers|Château]].
}}
* Le camp de César près des [[Les Ponts-de-Cé|Ponts-de-Cé]].
* Les ruines du château de [[Beaufort-en-Vallée|Beaufort]].
* Dans la principale église de [[Saint-Florent-le-Vieil|St Florent]] le monument sculpté par David et élevé à la mémoire du brave général vendéen Bonchamp qui au moment de mourir sauva la vie de 8,000 prisonniers républicains.
* Le château et le pont de [[Saumur]] ; son [[Le Cadre noir|école de cavalerie]].
* La maison de détention à [[Abbaye de Fontevraud|Fontevrault]].


'''CÉLÉBRITÉS'''
=== Célébrités ===
{{citation|
St Hilaire, évêque de Poitiers. Le Maréchal de Comtades. Le Maréchal Scepeaux de Vieilleville. Le Général Turpin de Crissé. Mme Dacier-Ménage. Les généraux vendéens : [[Le Pin-en-Mauges|Cathelineau]], de Scerpeaux, d'Antichamp, Bourmont et le vertueux Bonchamp. Les généraux de la république et de l'empire : Quétineau, Bontemps, Lemoine, Desjardins, Évain, Girard. Le marin [[Abel Aubert du Petit-Thouars|Dupetit-Thouars]] tué à Aboukir, son frère, un de nos savants botanistes. Le défenseur de Verdun Beaurepaire aussi revendiqué par le département de Seine et Marne. Le baron Trouvé, ancien préfet, auteur de l'ouvrage sur Jacques Cœur. La Bourdonnaye, ancien ministre. Bodin père et Bodin fils, députés. [[Pierre-Jean David d'Angers|David (d'Angers)]] célèbre sculpteur membre de l'Institut.
}}


* St Hilaire, évêque de Poitiers. Le Maréchal de Comtades.
=== Production, commerce ===
* Le Maréchal Scepeaux de Vieilleville.
{{citation|
* Le Général Turpin de Crissé.
Le département contient 691,077 hectares de superficie imposable et 31,086 de non imposable. Les imposables sont 440,196 hectares de terres labourables, 80,023 hectares de prés, 38,260 hectares de vignes, 61,838 hectares de bois sapins, chênes, hêtres, 48,271 hectares de landes pâtis et bruyères, 22,489 hectares de vergers, jardins, étangs, propriétés bâties.
* Mme Dacier-Ménage.
* Les généraux vendéens : [[Le Pin-en-Mauges|Cathelineau]], de Scerpeaux, d'Antichamp, Bourmont et le vertueux Bonchamp.
* Les généraux de la république et de l'empire : Quétineau, Bontemps, Lemoine, Desjardins, Évain, Girard.
* Le marin [[Abel Aubert du Petit-Thouars|Dupetit-Thouars]] tué à Aboukir, son frère, un de nos savants botanistes.
* Le défenseur de Verdun Beaurepaire aussi revendiqué par le département de Seine et Marne.
* Le baron Trouvé, ancien préfet, auteur de l'ouvrage sur Jacques Cœur.
* La Bourdonnaye, ancien ministre.
* Bodin père et Bodin fils, députés.
* [[Pierre-Jean David d'Angers|David (d'Angers)]] célèbre sculpteur membre de l'Institut.
 
'''PRODUCTION, COMMERCE'''
 
Le département contient 691,077 hectares de superficie imposable et 31,086 de non imposable. Les imposables sont  
* 440,196 hectares de terres labourables,  
* 80,023 hectares de prés,  
* 38,260 hectares de vignes,  
* 61,838 hectares de bois sapins, chênes, hêtres,  
* 48,271 hectares de landes pâtis et bruyères,  
* 22,489 hectares de vergers, jardins, étangs, propriétés bâties.


Production : toutes les céréales en quantité plus que suffisante pour la consommation. Sarrasin, légumes secs, noix, chanvre, lin, graine de trèfle. Arbres à fruits, pommes à cidre, pruniers et amandiers. Prunes de Sainte Catherine dont on fait d'excellents pruneaux. Vins de bonne qualité  
Production : toutes les céréales en quantité plus que suffisante pour la consommation. Sarrasin, légumes secs, noix, chanvre, lin, graine de trèfle. Arbres à fruits, pommes à cidre, pruniers et amandiers. Prunes de Sainte Catherine dont on fait d'excellents pruneaux. Vins de bonne qualité  
Ligne 86 : Ligne 61 :


Le Commerce consiste en grains, bestiaux, vin blanc et rouge, eaux-de-vie, vinaigres, lin, chanvre, pruneaux, confitures sèches, huile, miel, cire, bois de charpente et de construction ; chapelets de coco et verroterie pour les îles. Fabrique de toiles dites [[Musée du textile et de la mode de Cholet|Cholettes]] très renommées en France : de mouchoirs, de calicots d'indiennes. Draperie, tannerie, teinturerie ; Fabrique d'huile et exploitation considérable des [[Ardoisières|carrières d'ardoises]].
Le Commerce consiste en grains, bestiaux, vin blanc et rouge, eaux-de-vie, vinaigres, lin, chanvre, pruneaux, confitures sèches, huile, miel, cire, bois de charpente et de construction ; chapelets de coco et verroterie pour les îles. Fabrique de toiles dites [[Musée du textile et de la mode de Cholet|Cholettes]] très renommées en France : de mouchoirs, de calicots d'indiennes. Draperie, tannerie, teinturerie ; Fabrique d'huile et exploitation considérable des [[Ardoisières|carrières d'ardoises]].
}}
{{clr}}


== Autres données ==
== Tableau de la France de Jules Michelet en 1875 ==
[[Fichier:Michelet tableau de la france 1875 couverture.jpg|right|thumb|upright=1|link=Tableau de la France de Michelet - couverture|alt=Tableau de la France de 1875 de jules Michelet.]]


=== Tableau de la France de Jules Michelet en 1875 ===
{{citation|
C'est à Saint-Florent<ref>Extraits de [[Tableau de la France de Michelet]], "Géographie physique, politique et morale", Édition A. Lacroix et Cie, 1875, pages 15-17 ([[Tableau de la France de Michelet|voir]]).</ref>, au lieu même où s'élève la colonne du vendéen Bonchamps, qu'au IXe siècle le breton Noménoé, vainqueur des Northmans, avait dressé sa propre statue ; elle était tournée vers l'Anjou, vers la France qu'il regardait comme sa proie. Mais l'Anjou devait l'emporter. La grande féodalité dominait chez cette population plus disciplinable ; la Bretagne, avec son innombrable petite noblesse, ne pouvait faire de grande guerre ni de conquête. La noire ville d'Angers porte, non  seulement dans son vaste château et dans sa Tour du Diable, mais sur sa cathédrale même, ce caractère féodal. Cette église Saint-Maurice est chargée, non de saints, mais de chevaliers armés de pied en cap : toutefois ses flèches boiteuses, l'une sculptée, l'autre nue expriment suffisamment la destinée incomplète de l'Anjou. Malgré sa belle position sur le triple fleuve de la Maine, et si près de la Loire, où l'on distingue à leur couleur les eaux des quatre provinces, Angers dort aujourd'hui. C'est bien assez avoir quelque temps réuni sous ses Plantagenets, l'Angleterre, la Normandie, la Bretagne et l'Aquitaine ; d'avoir plus tard, sous le bon René et ses fils, possédé, disputé, revendiqué du moins les trônes de Naples, d'Aragon, de Jérusalem et de Provence, pendant que sa fille Marguerite soutenait la Rose rouge contre la Rose blanche et Lancastre contre York. Elles dorment aussi au murmure de la Loire les villes de Saumur et de Tours, la capitale du protestantisme, et la capitale du catholicisme en France ; Saumur, le petit royaume des prédicants et du vieux Duplessis-Mornay, contre lesquels leur bon ami Henri IV bâtit la Flèche aux jésuites. Son château de Mornay et son prodigieux dolmen font toujours de Saumur une ville historique. Mais bien autrement historique est la bonne ville de Tours, et son tombeau de Saint Martin, le vieil asile, le vieil oracle, le Delphes de la France, où les Mérovingiens venaient consulter les sorts, ce grand et lucratif pèlerinage pour lequel les comtes de Blois et d'Anjou ont tant rompu de lances. Mans, Angers, toute la Bretagne, dépendaient de l'archevêché de Tours ; ses chanoines, c'étaient les Capets, et les ducs de Bourgogne, de Bretagne, et le comte de Flandre et le patriarche de Jérusalem, les archevêques de Mayence, de Cologne, de Compostelle. Là, on battait monnaie, comme à Paris ; là on fabriqua de bonne heure la soie, les tissus précieux, et aussi, s'il faut le dire, ces confitures, ces rillettes, qui ont rendu Tours et Reims également célèbres ; villes de prêtres et de sensualité. Mais Paris, Lyon et Nantes ont fait tort à l'industrie de Tours.


C'est à Saint-Florent<ref>Extraits de [[Tableau de la France de Michelet]], "Géographie physique, politique et morale", Édition A. Lacroix et Cie, 1875, pages 15-17.</ref>, au lieu même où s'élève la colonne du vendéen Bonchamps, qu'au IXe siècle le breton Noménoé, vainqueur des Northmans, avait dressé sa propre statue ; elle était tournée vers l'Anjou, vers la France qu'il regardait comme sa proie. Mais l'Anjou devait l'emporter. La grande féodalité dominait chez cette population plus disciplinable ; la Bretagne, avec son innombrable petite noblesse, ne pouvait faire de grande guerre ni de conquête. La noire ville d'Angers porte, non  seulement dans son vaste château et dans sa Tour du Diable, mais sur sa cathédrale même, ce caractère féodal. Cette église Saint-Maurice est chargée, non de saints, mais de chevaliers armés de pied en cap : toutefois ses flèches boiteuses, l'une sculptée, l'autre nue expriment suffisamment la destinée incomplète de l'Anjou. Malgré sa belle position sur le triple fleuve de la Maine, et si près de la Loire, où l'on distingue à leur couleur les eaux des quatre provinces, Angers dort aujourd'hui. C'est bien assez avoir quelque temps réuni sous ses Plantagenets, l'Angleterre, la Normandie, la Bretagne et l'Aquitaine ; d'avoir plus tard, sous le bon René et ses fils, possédé, disputé, revendiqué du moins les trônes de Naples, d'Aragon, de Jérusalem et de Provence, pendant que sa fille Marguerite soutenait la Rose rouge contre la Rose blanche et Lancastre contre York. Elles dorment aussi au murmure de la Loire les villes de Saumur et de Tours, la capitale du protestantisme, et la capitale du catholicisme en France ; Saumur, le petit royaume des prédicants et du vieux Duplessis-Mornay, contre lesquels leur bon ami Henri IV bâtit la Flèche aux jésuites. Son château de Mornay et son prodigieux dolmen font toujours de Saumur une ville historique. Mais bien autrement historique est la bonne ville de Tours, et son tombeau de Saint Martin, le vieil asile, le vieil oracle, le Delphes de la France, où les Mérovingiens venaient consulter les sorts, ce grand et lucratif pèlerinage pour lequel les comtes de Blois et d'Anjou ont tant rompu de lances. Mans, Angers, toute la Bretagne, dépendaient de l'archevêché de Tours ; ses chanoines, c'étaient les Capets, et les ducs de Bourgogne, de Bretagne, et le comte de Flandre et le patriarche de Jérusalem, les archevêques de Mayence, de Cologne, de Compostelle. Là, on battait monnaie, comme à Paris ; là on fabriqua de bonne heure la soie, les tissus précieux, et aussi, s'il faut le dire, ces confitures, ces rillettes, qui ont rendu Tours et Reims également célèbres ; villes de prêtres et de sensualité. Mais Paris, Lyon et Nantes ont fait tort à l'industrie de Tours.
C'est la faute aussi de ce doux soleil, de cette molle Loire ; le travail est chose contre nature dans  ce paresseux climat de Tours, de Blois et de Chinon, dans cette patrie de Rabelais, près du tombeau d'Agnès Sorel. Chenonceaux, Chambord, Montbazon, Langeais, Loches, tous les favoris et favorites de nos rois, ont leurs châteaux le long de la rivière. C'est le pays du rire et du rien faire. Vive verdure en août comme en mai, des fruits, des arbres. Si vous regardez du bord, l'autre rive semble suspendue en l'air, tant l'eau réfléchit fidèlement le ciel : sable au bas, puis le saule qui vient boire dans le fleuve ; derrière, le peuplier, le tremble, le noyer, et les îles fuyant parmi les îles ; en montant, des têtes rondes d'arbres qui s'en vont moutonnant doucement les uns sur les autres. Molle et sensuelle contrée, c'est bien ici que l'idée sut venir de faire la femme reine des monastères, et de vivre sous elle dans une voluptueuse obéissance, mêlée d'amour et de sainteté. Aussi jamais abbaye n'eut la splendeur de Fontevrault. Il en reste aujourd'hui cinq églises. Plus d'un roi voulut y être enterré : même le farouche Richard Cœur-de-Lion légua son cœur ; il croyait que ce cœur meurtrier et parricide finirait pas reposer peut-être dans une douce main de femme, et sous la prière des vierges.
}}


C'est la faute aussi de ce doux soleil, de cette molle Loire ; le travail est chose contre nature dans  ce paresseux climat de Tours, de Blois et de Chinon, dans cette patrie de Rabelais, près du tombeau d'Agnès Sorel. Chenonceaux, Chambord, Montbazon, Langeais, Loches, tous les favoris et favorites de nos rois, ont leurs châteaux le long de la rivière. C'est le pays du rire et du rien faire. Vive verdure en août comme en mai, des fruits, des arbres. Si vous regardez du bord, l'autre rive semble suspendue en l'air, tant l'eau réfléchit fidèlement le ciel : sable au bas, puis le saule qui vient boire dans le fleuve ; derrière, le peuplier, le tremble, le noyer, et les îles fuyant parmi les îles ; en montant, des têtes rondes d'arbres qui s'en vont moutonnant doucement les uns sur les autres. Molle et sensuelle contrée, c'est bien ici que l'idée sut venir de faire la femme reine des monastères, et de vivre sous elle dans une voluptueuse obéissance, mêlée d'amour et de sainteté. Aussi jamais abbaye n'eut la splendeur de Fontevrault. Il en reste aujourd'hui cinq églises. Plus d'un roi voulut y être enterré : même le farouche Richard Cœur-de-Lion légua son cœur ; il croyait que ce cœur meurtrier et parricide finirait pas reposer peut-être dans une douce main de femme, et sous la prière des vierges.
== Géographie de Jules Verne en 1876 ==
[[Fichier:Julesverne geographiedelafrance1876 p393.jpg|right|thumb|upright=1|link=Géographie Jules Verne - page 393|alt=Géographie illustrée de la France de 1876 de Jules Verne.]]


=== Géographie de Jules Verne en 1876 ===
Données recensées par Jules Verne et publiées en 1876, comprenant la superficie, la population, l'agriculture, les mines et carrières, l'industrie et le commerce<ref>Extrait de l'ouvrage de Jules Verne, ''Géographie illustrée de la France et de ses colonies'', Édition J. Hetzel (Paris), 1876, p. 394-395 ([[Géographie Jules Verne - page 394|voir]]).</ref>.
'''SUPERFICIE et POPULATION'''<ref>Extrait de l'ouvrage de Jules Verne, ''Géographie illustrée de la France et de ses colonies'', Édition J. Hetzel (Paris), 1876, p. 394 ([[Géographie Jules Verne - page 394|voir]]).</ref>


=== Superficie et population ===
{{citation|
La superficie du département de Maine-et-Loire est de 712 563 hectares et sa population de 532 325 habitants ; ce qui donne environ 74 habitants par kilomètre carré ; l'accroissement de cette population a été de 15 500 âmes depuis le commencement du siècle ; elle se compose de 312 600 agriculteurs, 150 000 industriels ou commerçants, 12 000 habitants qui exercent des professions libérales et 45 000 sans profession.
La superficie du département de Maine-et-Loire est de 712 563 hectares et sa population de 532 325 habitants ; ce qui donne environ 74 habitants par kilomètre carré ; l'accroissement de cette population a été de 15 500 âmes depuis le commencement du siècle ; elle se compose de 312 600 agriculteurs, 150 000 industriels ou commerçants, 12 000 habitants qui exercent des professions libérales et 45 000 sans profession.


Ligne 103 : Ligne 85 :


La langue française est généralement employée dans les villes et les campagnes.
La langue française est généralement employée dans les villes et les campagnes.
}}


'''AGRICULTURE'''<ref>Extrait de l'ouvrage de la géographie de 1876 de Jules Verne (''op. cit.''), p. 394 et 395 ([[Géographie Jules Verne - page 394|voir]]).</ref>
=== Agriculture ===
 
{{citation|
Le département de Maine-et-Loire possède 461 000 hectares de terres labourables, 86 000 de prairies naturelles, 30 500 de vignes, 28 000 de pâturages, landes, bruyères, 106 000 de bois, forêt, terres incultes, etc. Le sol y est divisé en 1 650 000 parcelles de terrains, possédées par 4 000 propriétaires.
Le département de Maine-et-Loire possède 461 000 hectares de terres labourables, 86 000 de prairies naturelles, 30 500 de vignes, 28 000 de pâturages, landes, bruyères, 106 000 de bois, forêt, terres incultes, etc. Le sol y est divisé en 1 650 000 parcelles de terrains, possédées par 4 000 propriétaires.


Ligne 113 : Ligne 96 :


Le revenu brut des animaux domestiques dépasse 40 millions de francs, et la valeur totale de la production agricole s'élève, année commune, à 111 millions.
Le revenu brut des animaux domestiques dépasse 40 millions de francs, et la valeur totale de la production agricole s'élève, année commune, à 111 millions.
}}


'''MINES. CARRIÈRES'''<ref>Extrait de l'ouvrage de la géographie de 1876 de Jules Verne (''op. cit.''), p. 395 ([[Géographie Jules Verne - page 395|voir]]).</ref>
=== Mines, carrières ===
 
{{citation|
Le sol du département de Maine-et-Loire est granitique, schisteux, calcaire ou sablonneux ; il existe des minières de fer dans les arrondissements d'Angers et de Segré, qui forment à peu près toute sa richesse métallique ; quelques gisements de houille sont situés principalement sur les bords de la Loire et ont amené la concession de 9 houillères ; des carrières de granit, de porphyre de diverses couleurs, de gneiss, de marbres, de pierres à chaux, de grès, de tuf, etc. existent sur divers points du territoire ; mais les principales exploitations sont celles du schiste ardoisier, à Trélazé, près d'Angers, dont le rendement est très considérable, et qui sont exploitées soit à ciel ouvert, soit sous terre. Les principales sources minérales du département sont celles de Martigné-Briant, dans l'arrondissement de Saumur, qui sont principalement froides et ferrugineuses, celles d'Épervières près d'Angers, etc.
Le sol du département de Maine-et-Loire est granitique, schisteux, calcaire ou sablonneux ; il existe des minières de fer dans les arrondissements d'Angers et de Segré, qui forment à peu près toute sa richesse métallique ; quelques gisements de houille sont situés principalement sur les bords de la Loire et ont amené la concession de 9 houillères ; des carrières de granit, de porphyre de diverses couleurs, de gneiss, de marbres, de pierres à chaux, de grès, de tuf, etc. existent sur divers points du territoire ; mais les principales exploitations sont celles du schiste ardoisier, à Trélazé, près d'Angers, dont le rendement est très considérable, et qui sont exploitées soit à ciel ouvert, soit sous terre. Les principales sources minérales du département sont celles de Martigné-Briant, dans l'arrondissement de Saumur, qui sont principalement froides et ferrugineuses, celles d'Épervières près d'Angers, etc.
}}


'''INDUSTRIE. COMMERCE'''<ref>Extrait de l'ouvrage de la géographie de 1876 de Jules Verne (''op. cit.''), p. 395 ([[Géographie Jules Verne - page 395|voir]]).</ref>
=== Industrie, commerce===
 
{{citation|
Le département de Maine-et-Loire est manufacturier et industriel en même temps qu'agricole. Au premier rang de ses diverses industries se place la fabrication des tissus dont le centre est à Cholet, et qui occupe 50 000 ouvriers à la confection des batistes, calicots, flanelles, et à la filature des laines et du lin, puis dans les principales villes à Angers, à Mortagne, à Chemillé, à Saumur, etc., les filatures de laines et de chanvre, les fabriques de toiles à voiles, de bougies, de machines à vapeur, de clous, les fonderies, les verreries, les corderies, les tanneries, les papeteries, les teintureries, etc. On compte 6 usines pour la fabrication du fer, 5 houillères en exploitation, qui produisent environ 550 000 quintaux métriques de combustible, 15 ardoisières qui emploient près de 3 000 ouvriers, et de nombreuses carrières de tuffeau et de pierres calcaires.
Le département de Maine-et-Loire est manufacturier et industriel en même temps qu'agricole. Au premier rang de ses diverses industries se place la fabrication des tissus dont le centre est à Cholet, et qui occupe 50 000 ouvriers à la confection des batistes, calicots, flanelles, et à la filature des laines et du lin, puis dans les principales villes à Angers, à Mortagne, à Chemillé, à Saumur, etc., les filatures de laines et de chanvre, les fabriques de toiles à voiles, de bougies, de machines à vapeur, de clous, les fonderies, les verreries, les corderies, les tanneries, les papeteries, les teintureries, etc. On compte 6 usines pour la fabrication du fer, 5 houillères en exploitation, qui produisent environ 550 000 quintaux métriques de combustible, 15 ardoisières qui emploient près de 3 000 ouvriers, et de nombreuses carrières de tuffeau et de pierres calcaires.


Les éléments du commerce départemental sont fournis par les produits du territoire ; ce sont d'abord les céréales dont on exporte 400 000 hectolitres par an, le chanvre, les fruits et surtout les prunes, les vins, puis les chevaux, les mulets, les bœufs, les porcs, enfin les produits manufacturés, la fabrication de Cholet, les ardoises, etc.
Les éléments du commerce départemental sont fournis par les produits du territoire ; ce sont d'abord les céréales dont on exporte 400 000 hectolitres par an, le chanvre, les fruits et surtout les prunes, les vins, puis les chevaux, les mulets, les bœufs, les porcs, enfin les produits manufacturés, la fabrication de Cholet, les ardoises, etc.
}}


== Notes ==
== Notes ==
Sur le même sujet
Sur le même sujet
:- [[Indicateur de Maine et Loire de Millet - tome 1|Indicateur de Maine-et-Loire de P.-A. Millet de la Turtaudière, 1861]].
:[[Indicateur de Maine et Loire de Millet - tome 1|Indicateur de Maine-et-Loire de P.-A. Millet de la Turtaudière, tome 1, 1861]].
:- [[Dictionnaire Célestin Port/1874 - Tome 1 - Page XLVI|Dictionnaire Célestin Port, 1874-1878]].
:[[Dictionnaire Célestin Port/1874 - Tome 1 - Page XLVI|Dictionnaire Célestin Port, tome 1, page XLVI, 1874-1878]].
:- [[Géographie Jules Verne - page 393|Géographie de Jules Verne, 1876]].
:[[Géographie Jules Verne - page 393|Géographie de Jules Verne, 1876, p. 393]].
:- [[Notice sur Segré de Milon - couverture|Notice sur Segré de E. Milon, 1889]].
:[[Notice sur Segré de Milon - couverture|Notice sur Segré de E. Milon, 1889]].


Sources et annotations
Sources et annotations