« Discours du banquet du centenaire du lycée David-d'Angers » : différence entre les versions

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Pour le banquet du centenaire du Lycée,  
Pour le banquet du centenaire du Lycée,  
désirant donner à nos hôtes une idée de notre  
désirant donner à nos hôtes une idée de notre  
patois, j'avais adressé à plusieurs de mes correspondants  
patois, j’avais adressé à plusieurs de mes correspondants  
un canevas de discours, les  
un canevas de discours, les  
priant de le développer et de le traduire dans  
priant de le développer et de le traduire dans  
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<small>COMPAGNIE</small>,  
<small>COMPAGNIE</small>,  


Quand c'est que le garçon du Lycée s'est
Quand c’est que le garçon du Lycée s’est
amené [[fraquedale]] [[Avanze-hiar‎|avanze hiar]] dans ma [[cabourne]]  
amené [[fraquedale]] [[Avanze-hiar‎|avanze hiar]] dans ma [[cabourne]]  
avec [[ein]] mot d'écrit de M. le Proviseur,  
avec [[ein]] mot d’écrit de M. le Proviseur,  
j'ai eiu comme eine [[doutance]] de ce que  
j’ai eiu comme eine [[doutance]] de ce que  
ça pouvait ben [[étère]]. J'avais vu parler de  
ça pouvait ben [[étère]]. J’avais vu parler de  
queuque chouse parsus l'sahaies. Mais quand  
queuque chouse parsus l’sahaies. Mais quand  
minme j'ai pas pu m'opposer que de le [[bourder]]  
minme j’ai pas pu m’opposer que de le [[bourder]]  
ein moument pour me [[Guimander|guimanter]] au  
ein moument pour me [[Guimander|guimanter]] au  
juste. « Se paraît qu'il me dit, dit-il, que  
juste. « Se paraît qu’il me dit, dit-il, que  
c'est eine [[guérouée]] de professeurs et de  
c’est eine [[guérouée]] de professeurs et de  
grous [[magni-magnas]] qui vont se rassembler  
grous [[magni-magnas]] qui vont se rassembler  
pour le cenquième anniversaire du Lycée ;  
pour le cenquième anniversaire du Lycée ;  
minme que Monsieur le Recteur devait  
minme que Monsieur le Recteur devait  
venir tout à l'esprès pour se trouver avec  
venir tout à l’esprès pour se trouver avec  
entr eux. Au bahut, tout est par les places.  
entr eux. Au bahut, tout est par les places.  
Va gn'avoir ein galas à s'en faire peter la [[berdouille]].  
Va gn’avoir ein galas à s’en faire peter la [[berdouille]].  


Mais dam, par exemple, ne s'agira pas  
Mais dam, par exemple, ne s’agira pas  
que de fourchetter et de se rincer la [[dalle|dale]],  
que de fourchetter et de se rincer la [[dalle|dale]],  
et de s'en fourrer dans la [[beille]] : faudra que  
et de s’en fourrer dans la [[beille]] : faudra que  
tout un chacun, après le canard, la rincette  
tout un chacun, après le canard, la rincette  
et la surrincette, il y aille de sa petite [[orimus]].  
et la surrincette, il y aille de sa petite [[orimus]].  


Moue, j'aime autant [[licher]] le gratton à la  
Moue, j’aime autant [[licher]] le gratton à la  
cuisine ; je pourrai becqueter ben pus à mon  
cuisine ; je pourrai becqueter ben pus à mon  
aise. »  
aise. »  


Jai ren répons à cet [[adelaisi]], mais j'ai  
Jai ren répons à cet [[adelaisi]], mais j'ai  
trouvé tout de meinme qu'il 'tait point si  
trouvé tout de meinme qu'il ’tait point si  
colas que ça.  
colas que ça.  


Faut vous dire que dans mon jeune temps  
Faut vous dire que dans mon jeune temps  
j'ai ieu eine bonne platine tout comme l's
j’ai ieu eine bonne platine tout comme l’s
autres. La bonne femme qui m'avait coupé  
autres. La bonne femme qui m’avait coupé  
le [[lignou]] n'avait point volé ses cinq sous, et  
le [[lignou]] n’avait point volé ses cinq sous, et  
mon défunt père, en m'faisant donner de  
mon défunt père, en m’faisant donner de  
l'inducâtion, m'avait acheté de l'esprit à pu  
l’inducâtion, m’avait acheté de l’esprit à pu  
près ce que m'en fallait pour ma sarvitude.  
près ce que m’en fallait pour ma sarvitude.  
Dans ceté temps-là ça ne m'arait point gein-né  
Dans ceté temps-là ça ne m’arait point gein-né  
de m'espliquer devant toute eine [[bouée]] de  
de m’espliquer devant toute eine [[bouée]] de  
grousses légumes. Sèment, dempis qu'ils
[[légume (la)|grousses légumes]]. Sèment, dempis qu’ils
m'ont mis aux rémontises et renvoyé planter  
m’ont mis aux rémontises et renvoyé planter  
mes pourrées et mes [[naveau]]x, je me sé-t-il  
mes pourrées et mes [[naveau]]x, je me sé-t-il  
pas mis dans le micâmeau d'étuguier le  
pas mis dans le micâmeau d’étuguier le  
patois angevin ! J'ai pus ren fréquenté que  
patois angevin ! J’ai pus ren fréquenté que  
des castauds, des dâbres, des vire-bouses,  
des castauds, des dâbres, des vire-bouses,  
des bouers, des fourneliers, des [[perrayeux]],  
des bouers, des fourneliers, des [[perrayeux]],  
des boîtiers, des mégeilleux, des pirriers, des  
des boîtiers, des mégeilleux, des pirriers, des  
mariniasses, des traîne-bâton et jusqu'à des  
mariniasses, des traîne-bâton et jusqu’à des  
meillauds.  
meillauds.  


Je se devenu aussi poitras comme ieux ;  
Je se devenu aussi poitras comme ieux ;  
je se pu ren en tout qu'ein pouvré bonhomme  
je se pu ren en tout qu’ein pouvré bonhomme  
[[paisan]] qui a retombé dans ses vieux sabots  
[[paisan]] qui a retombé dans ses vieux sabots  
et au jour d'[[anhuit]], que faudrait que je  
et au jour d’[[anhuit]], que faudrait que je  
tiendrais mon bord au mitan d'eine bouée  
tiendrais mon bord au mitan d’eine bouée  
de beaux monsieurs, je sens qu'il m'en court  
de beaux monsieurs, je sens qu'il m’en court  
des friblons tout le long du râteau de l'échiné.  
des friblons tout le long du râteau de l’échiné.  


Enfin, pisqué c'est mon tour de mettre mon  
Enfin, pisqué c’est mon tour de mettre mon  
liard, quand ça devrait m'accrocher dans la  
liard, quand ça devrait m’accrocher dans la  
gorgeoire, je vas m'y coger tout de meinme.  
gorgeoire, je vas m’y coger tout de meinme.  
Faudra m'escuser si je jaquetonne eine  
Faudra m’escuser si je jaquetonne eine  
miette et ne pas trop pétoufler quand c'est
miette et ne pas trop pétoufler quand c’est
qu'il m'arrivera d'envoyer queuques coups  
qu’il m’arrivera d’envoyer queuques coups  
de pied dans la leune.  
de pied dans la leune.  


Comme ça, c'est donc [[anhuit]] le cenquième  
Comme ça, c’est donc [[anhuit]] le cenquième  
annivarsaire de noute Lycée ! Ça fait ein bon  
annivarsaire de noute Lycée ! Ça fait ein bon  
bail, et ç'arrive pas tous les jours que le bon  
bail, et ç’arrive pas tous les jours que le bon  
Guieu donne. Faut ben illy tomber pour se  
Guieu donne. Faut ben illy tomber pour se  
trouver à n'eine funérâille de meinme ! A  
trouver à n’eine funérâille de meinme ! A  
matin gn'avait ponmoins ein n'a-que-faire  
matin gn’avait ponmoins ein n’a-que-faire  
qui me disait comme ça : « Pisquère que ça  
qui me disait comme ça : « Pisquère que ça  
vous en décroch'te la margoulette et que ça  
vous en décroch’te la margoulette et que ça  
vous en bouche le châssifiau, rea que de penser  
vous en bouche le châssifiau, rea que de penser  
dans le petit magouinage que faut que  
dans le petit magouinage que faut que  
vous faisiez tantout, vous feriez vantiers  
vous faisiez tantout, vous feriez vantiers  
aussi ben d'attendre jusqu'à la procheunefois.  
aussi ben d’attendre jusqu’à la procheunefois.  


Enterci ce temps-là vous vous y habitueriez  
Enterci ce temps-là vous vous y habitueriez  
et vous seriez pas si émoyé le moument  
et vous seriez pas si émoyé le moument  
venu ! » — Oui, mais râle si dans cent ans  
venu ! » — Oui, mais râle si dans cent ans  
je ne se point n'en chantier de manger les  
je ne se point n’en chantier de manger les  
pissenlits de Touche aux mottes par la ris.  
pissenlits de Touche aux mottes par la ris.  
J'avons pas les rouchets assez durs pour  
J’avons pas les rouchets assez durs pour  
résister tant que ça, m'est évis, et c'est pas dû  
résister tant que ça, m’est évis, et c’est pas dû  
à tout le monde de porter son bois comme le  
à tout le monde de porter son bois comme le  
père Chevreul.  
père Chevreul.  


Tout de meinme faut-il qu'il illy en aye  
Tout de meinme faut-il qu’il illy en aye  
passé sus nous bancs des treulées de queneaux !  
passé sus nous bancs des treulées de queneaux !  
Faut-il qu'il s'en seye usé des rabâtées  
Faut-il qu’il s’en seye usé des rabâtées  
de fonçailles de culottes ! Faut-il qu'il s'en
de fonçailles de culottes ! Faut-il qu’il s’en
seye fait de l'écriture de pleume, et dit des  
seye fait de l’écriture de pleume, et dit des  
rapiâmusses, et coque des migolées de soupe !  
rapiâmusses, et coque des migolées de soupe !  
Quand je carcule tout ça, bonnes gens, je ne  
Quand je carcule tout ça, bonnes gens, je ne  
sarais en revenir ; ren que de penser là-dedans  
sarais en revenir ; ren que de penser là-dedans  
j'en se tout ébaffé.  
j’en se tout ébaffé.  


Mais dam aussit il en a sorti de noute Lycée,  
Mais dam aussit il en a sorti de noute Lycée,  
Ligne 128 : Ligne 128 :
boute-hors, des hommes qui ont pas les deux  
boute-hors, des hommes qui ont pas les deux  
pieds dans le même sabot, ben en le cas de se  
pieds dans le même sabot, ben en le cas de se  
dépasser et de s'épourchasser parmi le monde.  
dépasser et de s’épourchasser parmi le monde.  
Regardez ein petit queune guérouée de médecins,  
Regardez ein petit queune guérouée de médecins,  
d'avocats, d'avouas, de notaires, d'officiers,  
d’avocats, d’avouas, de notaires, d’officiers,  
d'industriels, de commarçants, de propriétaires,  
d’industriels, de commarçants, de propriétaires,  
de grous de la grousse de toutes  
de grous de la grousse de toutes  
les modes et manières que velà environ nous !  
les modes et manières que velà environ nous !  


C'est pas pour nous allouser, mais tout de  
C’est pas pour nous allouser, mais tout de  
meinme on peut ben dire qu'ein pervail  
meinme on peut ben dire qu’ein pervail  
comme ça, c'est pas de la gnognote!  
comme ça, c’est pas de la gnognote!  


Il en est venu de la [[mar]] et de la [[Soulair|soulère]],  
Il en est venu de la [[mar]] et de la [[Soulair|soulère]],  
du pays-haut et du pays-bas ; gn'a là des  
du pays-haut et du pays-bas ; gn’a là des  
galarnois et des marpeaux, et des perrauds ;  
galarnois et des marpeaux, et des perrauds ;  
de tous les coins-cornières, par mares et par  
de tous les coins-cornières, par mares et par  
Ligne 146 : Ligne 146 :
ribon la loi, à coûté de leux vieux régents  
ribon la loi, à coûté de leux vieux régents  
pour célébrer avec nous la glouère de noute  
pour célébrer avec nous la glouère de noute  
Lycée David d'Angers.  
Lycée [[David d'Angers|David d’Angers]].  


Marcit à ieux tortous.  
Marcit à ieux tortous.  
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encore pus agréablement la [[ressiée]].  
encore pus agréablement la [[ressiée]].  


Pour eine belle cérimonie, c'est eine belle  
Pour eine belle cérimonie, c’est eine belle  
cérimonie. Je nous en sourveindrons [[terjous]],  
cérimonie. Je nous en sourveindrons [[terjous]],  
et je crois que là-haut noute grand patron  
et je crois que là-haut noute grand patron  
David est tout fiar de nous présider.  
David est tout fiar de nous présider.  


Tenez, pisqu'il se trouve que le nom de  
Tenez, pisqu’il se trouve que le nom de  
noute illustre sculpteur est venu à lieu, parmettez-moi  
noute illustre sculpteur est venu à lieu, parmettez-moi  
de vous dire, pour finir, eine idée  
de vous dire, pour finir, eine idée  
Ligne 166 : Ligne 166 :


Vous êtes pas en ignore que [[Pierre-Jean David d'Angers|David]] a fait  
Vous êtes pas en ignore que [[Pierre-Jean David d'Angers|David]] a fait  
l'estatue de Bonchamps, qui est dans l'église
l’estatue de Bonchamps, qui est dans l’église
de Saint-Florent-le-Vieil, et c'est vantiers ben  
de Saint-Florent-le-Vieil, et c’est [[vantié|vantiers]] ben  
la plus belle estatue qu'il ait guère esculptée.  
la plus belle estatue qu’il ait guère esculptée.  


Ce qui illi a donné de l'engivane hors raison  
Ce qui illi a donné de l’engivane hors raison  
pour la torcher de meinme, c'est qu'il travaillait  
pour la torcher de meinme, c’est qu’il travaillait  
en mimoire de son père.  
en mimoire de son père.  


Ligne 180 : Ligne 180 :
tantines. Je voulons leux élever sus leux  
tantines. Je voulons leux élever sus leux  
tombes eine manière de croix-orée avec leux  
tombes eine manière de croix-orée avec leux  
bons vieux mots de l'ancien temps. Les [[villotier]]s,  
bons vieux mots de l’ancien temps. Les [[villotier]]s,  
les petits fernaculs du boulevard s'émaginent
les petits fernaculs du boulevard s’émaginent
que c'est ein jargouiu sauvage, bon  
que c’est ein jargouiu sauvage, bon  
pour des [[paisan]]s bâchas ; ils sont absulument  
pour des [[paisan]]s bâchas ; ils sont absulument  
en erreur. Badez ben à ce que je vous dis là ;  
en erreur. Badez ben à ce que je vous dis là ;  
gn'a dans noute patois des matriaux d'eine
gn’a dans noute patois des matriaux d’eine
valeur étonnante. Malhureusement je sommes  
valeur étonnante. Malhureusement je sommes  
point Ces David d'Angers pour ieux donner  
point Ces David d’Angers pour ieux donner  
la tournure que faudrait ; mais quand meinme  
la tournure que faudrait ; mais quand meinme  
j'allons tâcher d'en faire queuque chouse d'à
j’allons tâcher d’en faire queuque chouse d’à
pu près ben dérigodé. Vous verrez ça à  
pu près ben dérigodé. Vous verrez ça à  
l'usure.  
l’usure.  


[[Astheûre|Astheure]] si ça vous haite, j'allons, pour  
[[Astheûre|Astheure]] si ça vous haite, j’allons, pour  
faire baisser les morceaux, boire eine chinchée  
faire baisser les morceaux, boire eine chinchée  
de sigournet à la santé des vieux bahutiers.  
de sigournet à la santé des vieux bahutiers.  
J'espère que vous en êtes tortous d'assent.  
J’espère que vous en êtes tortous d’assent.  
Baulez donc quant et moi :  
Baulez donc quant et moi :  


Vive l'Association amicale des anciens  
Vive l’Association amicale des anciens  
élèves du Lycée David d'Angers.  
élèves du Lycée David d’Angers.  


Le Longeron,  
Le Longeron,  
Ligne 210 : Ligne 210 :
C<small>OPAINS</small>, P<small>ARAGEAUX</small>, P<small>ARSONNIERS</small>,  
C<small>OPAINS</small>, P<small>ARAGEAUX</small>, P<small>ARSONNIERS</small>,  


Je sommes [[À c't'heure|à c't' heure]] rassemblés [[ène]]  
Je sommes [[À c't'heure|à c’t’ heure]] rassemblés [[ène]]  
guérouée pour fêter le centenaire de noute  
guérouée pour fêter le centenaire de noute  
Ecole.  
Ecole.  


1806-1906. Cent ans!... c'est y bentout  
1806-1906. Cent ans!... c'est y bentout  
passé !... Et pourtant c'té treulée de jours,  
passé !... Et pourtant c’té treulée de jours,  
c'té défilongée de mois et d'an-nées, le moins  
c’té défilongée de mois et d’an-nées, le moins  
cabassé de nous et le pus bastant pourrait-y  
cabassé de nous et le pus bastant pourrait-y  
çartifier en voir le boute? J'avons ben des  
çartifier en voir le boute? J’avons ben des  
chances d'être [[Carpâiller|carpaillés]] avant. Seul queuqu'un,  
chances d'être [[Carpâiller|carpaillés]] avant. Seul queuqu’un,  
comme noute compatriote Chevreul,  
comme noute compatriote Chevreul,  
à carbichon sus deux siècles, aurait pu var  
à carbichon sus deux siècles, aurait pu var  
le c' mincement et la fin. Queuques-uns encore  
le c’ mincement et la fin. Queuques-uns encore  
de nos [[Queniaux|quéniaux]] artilloux ou à la mine  
de nos [[Queniaux|quéniaux]] artilloux ou à la mine  
émoyée, aux cheveux gaillonnés, verront  
émoyée, aux cheveux gaillonnés, verront  
ventié 2006, mais c'est gandilleux, ça ne  
ventié 2006, mais c’est gandilleux, ça ne  
serait pourtant pas à déjeter, mais né vous  
serait pourtant pas à déjeter, mais né vous  
emboimez pas trop fort.  
emboimez pas trop fort.  


En tout cas, j'avons yu [[anhuit]] ène fête  
En tout cas, j’avons yu [[anhuit]] ène fête  
ben aguibrée, ben dérigoguée et, de [[ressiée]],  
ben aguibrée, ben dérigoguée et, de [[ressiée]],  
toute noute junesse a été ben hureuse.  
toute noute junesse a été ben hureuse.  
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on ne peut pus hargaignoux.  
on ne peut pus hargaignoux.  


Sans décoter, des parsonnages qu'ont pas  
Sans décoter, des parsonnages qu’ont pas  
la langue dans leu poche nous ont rabâté,  
la langue dans leu poche nous ont rabâté,  
sans berciller, ène acas de discours. Y  
sans berciller, ène acas de discours. Y  
nous ont débagoulé in tas de [[rimiaux]] à  
nous ont débagoulé in tas de [[rimiaux]] à  
vous faire boyer le bec ; je ne sais pas ioù  
vous faire boyer le bec ; je ne sais pas ioù  
qu'ils ont été les pêcher. — Faut tout de  
qu’ils ont été les pêcher. — Faut tout de  
même pas être bobane pour arrimer ène  
même pas être bobane pour arrimer ène  
affourée de mots pareils, et mettre tout ça  
affourée de mots pareils, et mettre tout ça  
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bourra.  
bourra.  


J'avons entendu, sans l'alouser, ène fameuse  
J’avons entendu, sans l’alouser, ène fameuse  
musique militaire, des artisses ben argotés  
musique militaire, des artisses ben argotés  
qu'ont chanté et joué de la pibole, d'autres
qu’ont chanté et joué de la pibole, d’autres
ben en bagout qu'ont dit tout pien de racontes ;  
ben en bagout qu’ont dit tout pien de racontes ;  
y avait yoù bouler de rire. Ah ! y  
y avait yoù bouler de rire. Ah ! y  
n'ont pas la fergane clouse !  
n’ont pas la fergane clouse !  


Le soir, arrière, y avait fénérailles ; le repas  
Le soir, arrière, y avait fénérailles ; le repas  
était vrai ben sarvi ; j'avions de la broute à  
était vrai ben sarvi ; j’avions de la broute à  
veillassu et qui n'avait pas goût de faguena,  
veillassu et qui n’avait pas goût de faguena,  
y avait qu'à piger ; on n'tait p'en le cas de  
y avait qu’à piger ; on n’tait p’en le cas de  
tout manger, ben sûr, et ren qu'avec nos  
tout manger, ben sûr, et ren qu’avec nos  
essilles on aurait fait in bon collation.  
essilles on aurait fait in bon collation.  


Et des vins, mes amis, queus vins ! à faire  
Et des vins, mes amis, queus vins ! à faire  
reviler queuqu'un qui serait terbéli ! C'était
reviler queuqu’un qui serait terbéli ! C’était
pas de la rapustée. Je vous assure qu'aussite,  
pas de la rapustée. Je vous assure qu’aussite,  
en sortant de table, j'avions point l'ar pâtiras  
en sortant de table, j’avions point l’ar pâtiras  
ni faluchet ; j'avions putout éne mine éfestouie  
ni faluchet ; j’avions putout éne mine éfestouie  
et le sibot allumé.  
et le sibot allumé.  


Aussite je sommes ben reconnaissants de  
Aussite je sommes ben reconnaissants de  
toutes les preuves d'amiquié qu'on nous a  
toutes les preuves d’amiquié qu’on nous a  
données. J'avons de meshuit fait de noute  
données. J’avons de meshuit fait de noute  
mieux pour souteni dignement le drapeau du  
mieux pour souteni dignement le drapeau du  
Lycée qui porte le nom de l'illustre David  
Lycée qui porte le nom de l’illustre David  
d'Angers ; et j'ai des doutances que je sommes  
d’Angers ; et j’ai des doutances que je sommes  
tous d'assent pour essayer de faire côre in  
tous d’assent pour essayer de faire côre in  
mion mieux, si c'est pas trop à désamain  
mion mieux, si c’est pas trop à désamain.


Je remarcions ben tous l'z amis qui sont  
Je remarcions ben tous l’z amis qui sont  
venus au mitan de nous et je les prions de  
venus au mitan de nous et je les prions de  
garder de nous in bon souvenir.  
garder de nous in bon souvenir.  


Buvons éne chinchée à l'association amicale  
Buvons éne chinchée à l’association amicale  
des Anciens élèves du Lycée d'Angers.  
des Anciens élèves du Lycée d'Angers.  


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C<small>hers</small> P<small>AREGEAUX</small>,  
C<small>hers</small> P<small>AREGEAUX</small>,  


Nous v'ià anuit teurtous réunis en mouceaux  
Nous v’ià anuit teurtous réunis en mouceaux  
pour fêter le centenaire de nout'
pour fêter le centenaire de nout’
école. Nous v'ià toute eune guerrouée et  
école. Nous v’ià toute eune guerrouée et  
teurtous ben dérigohiés, tellement j'sommes
teurtous ben dérigohiés, tellement j’sommes
ben aises de nous rasserrer enteur nous.  
ben aises de nous rasserrer enteur nous.  


R'gardez var un brin ! J'sommes teurtous  
R’gardez var un brin ! J’sommes teurtous  
égaillés en bise et en galarne. J'traveuchons
égaillés en bise et en galarne. J’traveuchons
chacun à nout' amain et annuit ren n'au-
chacun à nout’ amain et annuit ren n’aurait
rait pu nous bourder de venir à toute c'te
pu nous bourder de venir à toute c’te
funéraille.  
funéraille.  


Nout' compatriote Chevreul, qu'était dru  
Nout’ compatriote Chevreul, qu’était dru  
comme eine vieille souche d'umeau, aurait  
comme eine vieille souche d’umeau, aurait  
ben assez vécu pour var 1806 et 1906 ; et  
ben assez vécu pour var 1806 et 1906 ; et  
[[vantié]] ben queuque-z-uns d'nos [[queniaux]]  
[[vantié]] ben queuque-z-uns d’nos [[queniaux]]  
aux cheveux si ben gueillonnés, s"raient
aux cheveux si ben gueillonnés, s’raient
ben en l'cas d'var 2006 ; mais j'cré qu' c'est
ben en l’cas d’var 2006 ; mais j’cré qu’ c’est
ben râle. Ouéy'vous, à c't'heure, sans nous  
ben râle. Ouéy’vous, à c’t’heure, sans nous  
alouser ni nous mépriser, la jeunesse d'anuit
alouser ni nous mépriser, la jeunesse d’anuit
est moins forieuse que dans les temps de  
est moins forieuse que dans les temps de  
c'te gent si savante ; tous les queniaux  
c’te gent si savante ; tous les queniaux  
ont l'air un brin quérée, mais faut pas crére  
ont l’air un brin quérée, mais faut pas crére  
que s'ils ont la [[goule]] nuble et point rougeaude,  
que s’ils ont la [[goule]] nuble et point rougeaude,  
que le cœur n'est point à gré. Ah ! dame non ;  
que le cœur n’est point à gré. Ah ! dame non ;  
j'l' avons tertous franc comme l'ousier et  
j’l’ avons tertous franc comme l’ousier et  
n'saurait nous bourder de ben faire.  
n’saurait nous bourder de ben faire.  


J'avons eu à matin comme vous avez ben  
J’avons eu à matin comme vous avez ben  
pu le var teurtous eune finie belle cérémonie,  
pu le var teurtous eune finie belle cérémonie,  
toute la junesse était vrai ben diri et de ressiée  
toute la junesse était vrai ben diri et de ressiée  
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ne sorgnait.  
ne sorgnait.  


Toutes les grousses légumes de nout' ville  
Toutes les grousses légumes de nout’ ville  
nous avaient honorés de leur présence ;  
nous avaient honorés de leur présence ;  
jusqu'à M. le Recteur qu'é venu de Rennes  
jusqu’à M. le Recteur qu’é venu de Rennes  
d'eune hardise ! et point par un trop beau  
d’eune hardise ! et point par un trop beau  
temps. Le fait est que dans c'té saison il est  
temps. Le fait est que dans c’té saison il est  
toujous ben gandilleux ; on craint toujous des  
toujous ben gandilleux ; on craint toujous des  
ouzées ; le vent est toujou fouré dret dans le  
ouzées ; le vent est toujou fouré dret dans le  
nid à la piée.  
nid à la piée.  


Et pis j'avons eu de biaux discours ; faut  
Et pis j’avons eu de biaux discours ; faut  
êteur vrai ben [[renâré|renarê]] pour aller quérir tous  
êteur vrai ben [[renâré|renarê]] pour aller quérir tous  
ces [[rimiaux]], et si ben les dégoiser. Et la  
ces [[rimiaux]], et si ben les dégoiser. Et la  
musique, en avons-nous eu eune teriolée !  
musique, en avons-nous eu eune teriolée !  
oh ! é n'a guère bourde ! de la musique militaire  
oh ! é n’a guère bourde ! de la musique militaire  
et pis des artisses qu'ont chanté et joué  
et pis des artisses qu’ont chanté et joué  
de la pibole, dit des racontars... Et vous  
de la pibole, dit des racontars... Et vous  
créyez ! on se serait cru en paradis.  
créyez ! on se serait cru en paradis.  


De c't'affaire, tout le monde avait pouillé  
De c’t’affaire, tout le monde avait pouillé  
son plus beau fait, et, de soir, j'avons eune  
son plus beau fait, et, de soir, j’avons eune  
fameuse pension, un vrai bon nourrit, ren  
fameuse pension, un vrai bon nourrit, ren  
que du fait ben gouleyant, et qui vaut mieux  
que du fait ben gouleyant, et qui vaut mieux  
que d'aucuns piochons dont j'ai entendu  
que d’aucuns piochons dont j’ai entendu  
parler, et qui vous fourrent le cours de  
parler, et qui vous fourrent le cours de  
ventre. Et des vins ! Ah ! mâtin ! y a de que  
ventre. Et des vins ! Ah ! mâtin ! y a de que  
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Comme je devons éteur ben reconnaissants  
Comme je devons éteur ben reconnaissants  
de toutes ces peuves d'amiquié qu'on nous  
de toutes ces peuves d’amiquié qu’on nous  
a données!... J'avons jusqu'anuit fait de  
a données!... J’avons jusqu’anuit fait de  
nout' mieux pour soutenir dignement le dra-
nout’ mieux pour soutenir dignement le drapeau
peau du Lycée qui porte le nom de l'illustre
du Lycée qui porte le nom de l’illustre
David d'Angers. Faudra essayer de faire cor  
David d’Angers. Faudra essayer de faire cor  
mieux et tâchons de ne point trouver sur  
mieux et tâchons de ne point trouver sur  
nout' va des bateleux qui nous fassent aller  
nout’ va des bateleux qui nous fassent aller  
à [[d'zamain]].  
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''Deuxième partie — Dialogues, récits, contes et nouvelles en patois'', pages 372 à 374, discours en patois angevin prononcé par M. Verrier à l'occasion du banquet du centenaire du lycée David-d'Angers en [[1906]].
''Glossaire étymologique et historique des parlers et patois de l'Anjou'' — ''Deuxième partie'' ''Dialogues, récits, contes et nouvelles en patois'', pages 372 à 374, discours en patois angevin prononcé par M. Verrier à l'occasion du banquet du centenaire du lycée David-d'Angers en [[1906]].





Version du 3 août 2018 à 16:44

Langue et littérature angevine
Document   Discours du banquet du centenaire du lycée David-d'Angers
Auteur   Anatole-Joseph Verrier et René Onillon
Année d'édition   1908
Éditeur   Germain et G. Grassin (Angers)
Note(s)   Extrait du Glossaire étymologique et historique des parlers et patois de l'Anjou.


Pour le banquet du centenaire du Lycée, désirant donner à nos hôtes une idée de notre patois, j’avais adressé à plusieurs de mes correspondants un canevas de discours, les priant de le développer et de le traduire dans le patois de leur région. Je reçus trois réponses. Voici la première, de mon ami R. Onillon.

l° Région de Montjean

MONSIEUR LE PRÉSIDENT, CHERS COPAINS, PARSONNIERS, PARAGEAUX ET TOUTE LA COMPAGNIE,

Quand c’est que le garçon du Lycée s’est amené fraquedale avanze hiar dans ma cabourne avec ein mot d’écrit de M. le Proviseur, j’ai eiu comme eine doutance de ce que ça pouvait ben étère. J’avais vu parler de queuque chouse parsus l’sahaies. Mais quand minme j’ai pas pu m’opposer que de le bourder ein moument pour me guimanter au juste. « Se paraît qu’il me dit, dit-il, que c’est eine guérouée de professeurs et de grous magni-magnas qui vont se rassembler pour le cenquième anniversaire du Lycée ; minme que Monsieur le Recteur devait venir tout à l’esprès pour se trouver avec entr eux. Au bahut, tout est par les places. Va gn’avoir ein galas à s’en faire peter la berdouille.

Mais dam, par exemple, ne s’agira pas que de fourchetter et de se rincer la dale, et de s’en fourrer dans la beille : faudra que tout un chacun, après le canard, la rincette et la surrincette, il y aille de sa petite orimus.

Moue, j’aime autant licher le gratton à la cuisine ; je pourrai becqueter ben pus à mon aise. »

Jai ren répons à cet adelaisi, mais j'ai trouvé tout de meinme qu'il ’tait point si colas que ça.

Faut vous dire que dans mon jeune temps j’ai ieu eine bonne platine tout comme l’s autres. La bonne femme qui m’avait coupé le lignou n’avait point volé ses cinq sous, et mon défunt père, en m’faisant donner de l’inducâtion, m’avait acheté de l’esprit à pu près ce que m’en fallait pour ma sarvitude. Dans ceté temps-là ça ne m’arait point gein-né de m’espliquer devant toute eine bouée de grousses légumes. Sèment, dempis qu’ils m’ont mis aux rémontises et renvoyé planter mes pourrées et mes naveaux, je me sé-t-il pas mis dans le micâmeau d’étuguier le patois angevin ! J’ai pus ren fréquenté que des castauds, des dâbres, des vire-bouses, des bouers, des fourneliers, des perrayeux, des boîtiers, des mégeilleux, des pirriers, des mariniasses, des traîne-bâton et jusqu’à des meillauds.

Je se devenu aussi poitras comme ieux ; je se pu ren en tout qu’ein pouvré bonhomme paisan qui a retombé dans ses vieux sabots et au jour d’anhuit, que faudrait que je tiendrais mon bord au mitan d’eine bouée de beaux monsieurs, je sens qu'il m’en court des friblons tout le long du râteau de l’échiné.

Enfin, pisqué c’est mon tour de mettre mon liard, quand ça devrait m’accrocher dans la gorgeoire, je vas m’y coger tout de meinme. Faudra m’escuser si je jaquetonne eine miette et ne pas trop pétoufler quand c’est qu’il m’arrivera d’envoyer queuques coups de pied dans la leune.

Comme ça, c’est donc anhuit le cenquième annivarsaire de noute Lycée ! Ça fait ein bon bail, et ç’arrive pas tous les jours que le bon Guieu donne. Faut ben illy tomber pour se trouver à n’eine funérâille de meinme ! A matin gn’avait ponmoins ein n’a-que-faire qui me disait comme ça : « Pisquère que ça vous en décroch’te la margoulette et que ça vous en bouche le châssifiau, rea que de penser dans le petit magouinage que faut que vous faisiez tantout, vous feriez vantiers aussi ben d’attendre jusqu’à la procheunefois.

Enterci ce temps-là vous vous y habitueriez et vous seriez pas si émoyé le moument venu ! » — Oui, mais râle si dans cent ans je ne se point n’en chantier de manger les pissenlits de Touche aux mottes par la ris. J’avons pas les rouchets assez durs pour résister tant que ça, m’est évis, et c’est pas dû à tout le monde de porter son bois comme le père Chevreul.

Tout de meinme faut-il qu’il illy en aye passé sus nous bancs des treulées de queneaux ! Faut-il qu’il s’en seye usé des rabâtées de fonçailles de culottes ! Faut-il qu’il s’en seye fait de l’écriture de pleume, et dit des rapiâmusses, et coque des migolées de soupe ! Quand je carcule tout ça, bonnes gens, je ne sarais en revenir ; ren que de penser là-dedans j’en se tout ébaffé.

Mais dam aussit il en a sorti de noute Lycée, pas des harquéliers ni des happelopins, ren que des gens à la roulette qui ont du gingin et du boute-hors, des hommes qui ont pas les deux pieds dans le même sabot, ben en le cas de se dépasser et de s’épourchasser parmi le monde. Regardez ein petit queune guérouée de médecins, d’avocats, d’avouas, de notaires, d’officiers, d’industriels, de commarçants, de propriétaires, de grous de la grousse de toutes les modes et manières que velà environ nous !

C’est pas pour nous allouser, mais tout de meinme on peut ben dire qu’ein pervail comme ça, c’est pas de la gnognote!

Il en est venu de la mar et de la soulère, du pays-haut et du pays-bas ; gn’a là des galarnois et des marpeaux, et des perrauds ; de tous les coins-cornières, par mares et par bouillons, ils se sont décanchés à accoure ribon la loi, à coûté de leux vieux régents pour célébrer avec nous la glouère de noute Lycée David d’Angers.

Marcit à ieux tortous.

Je remarcie aussit tous ces artisses qui sont venus avec leux toutoutes, leux vèzes et leux piboles, musiquer pour nous faire passer encore pus agréablement la ressiée.

Pour eine belle cérimonie, c’est eine belle cérimonie. Je nous en sourveindrons terjous, et je crois que là-haut noute grand patron David est tout fiar de nous présider.

Tenez, pisqu’il se trouve que le nom de noute illustre sculpteur est venu à lieu, parmettez-moi de vous dire, pour finir, eine idée qui me passe par le ciboulot.

Vous êtes pas en ignore que David a fait l’estatue de Bonchamps, qui est dans l’église de Saint-Florent-le-Vieil, et c’est vantiers ben la plus belle estatue qu’il ait guère esculptée.

Ce qui illi a donné de l’engivane hors raison pour la torcher de meinme, c’est qu’il travaillait en mimoire de son père.

Eh ben, nous aussit je travaillons en mimoire de nous pères, de nous grand-pères, de nous grands-grand-pères, de nous pépés et de nous mêmes, de nous tontons et de nous tantines. Je voulons leux élever sus leux tombes eine manière de croix-orée avec leux bons vieux mots de l’ancien temps. Les villotiers, les petits fernaculs du boulevard s’émaginent que c’est ein jargouiu sauvage, bon pour des paisans bâchas ; ils sont absulument en erreur. Badez ben à ce que je vous dis là ; gn’a dans noute patois des matriaux d’eine valeur étonnante. Malhureusement je sommes point Ces David d’Angers pour ieux donner la tournure que faudrait ; mais quand meinme j’allons tâcher d’en faire queuque chouse d’à pu près ben dérigodé. Vous verrez ça à l’usure.

Astheure si ça vous haite, j’allons, pour faire baisser les morceaux, boire eine chinchée de sigournet à la santé des vieux bahutiers. J’espère que vous en êtes tortous d’assent. Baulez donc quant et moi :

Vive l’Association amicale des anciens élèves du Lycée David d’Angers.

Le Longeron,

R. Onillon.

2° Région de Brissac

COPAINS, PARAGEAUX, PARSONNIERS,

Je sommes à c’t’ heure rassemblés ène guérouée pour fêter le centenaire de noute Ecole.

1806-1906. Cent ans!... c'est y bentout passé !... Et pourtant c’té treulée de jours, c’té défilongée de mois et d’an-nées, le moins cabassé de nous et le pus bastant pourrait-y çartifier en voir le boute? J’avons ben des chances d'être carpaillés avant. Seul queuqu’un, comme noute compatriote Chevreul, à carbichon sus deux siècles, aurait pu var le c’ mincement et la fin. Queuques-uns encore de nos quéniaux artilloux ou à la mine émoyée, aux cheveux gaillonnés, verront ventié 2006, mais c’est gandilleux, ça ne serait pourtant pas à déjeter, mais né vous emboimez pas trop fort.

En tout cas, j’avons yu anhuit ène fête ben aguibrée, ben dérigoguée et, de ressiée, toute noute junesse a été ben hureuse.

Tout le monde avait pouillé son beau fait et le moins faupi.

Toutes les grousses légumes de la ville et des entours ont quient à nous honorer de leu présence, et M. le Recteur li-même, point craint-peine est venu de Rennes par in temps on ne peut pus hargaignoux.

Sans décoter, des parsonnages qu’ont pas la langue dans leu poche nous ont rabâté, sans berciller, ène acas de discours. Y nous ont débagoulé in tas de rimiaux à vous faire boyer le bec ; je ne sais pas ioù qu’ils ont été les pêcher. — Faut tout de même pas être bobane pour arrimer ène affourée de mots pareils, et mettre tout ça ben dret et de rang, et non pas bourri- bourra.

J’avons entendu, sans l’alouser, ène fameuse musique militaire, des artisses ben argotés qu’ont chanté et joué de la pibole, d’autres ben en bagout qu’ont dit tout pien de racontes ; y avait yoù bouler de rire. Ah ! y n’ont pas la fergane clouse !

Le soir, arrière, y avait fénérailles ; le repas était vrai ben sarvi ; j’avions de la broute à veillassu et qui n’avait pas goût de faguena, y avait qu’à piger ; on n’tait p’en le cas de tout manger, ben sûr, et ren qu’avec nos essilles on aurait fait in bon collation.

Et des vins, mes amis, queus vins ! à faire reviler queuqu’un qui serait terbéli ! C’était pas de la rapustée. Je vous assure qu’aussite, en sortant de table, j’avions point l’ar pâtiras ni faluchet ; j’avions putout éne mine éfestouie et le sibot allumé.

Aussite je sommes ben reconnaissants de toutes les preuves d’amiquié qu’on nous a données. J’avons de meshuit fait de noute mieux pour souteni dignement le drapeau du Lycée qui porte le nom de l’illustre David d’Angers ; et j’ai des doutances que je sommes tous d’assent pour essayer de faire côre in mion mieux, si c’est pas trop à désamain.

Je remarcions ben tous l’z amis qui sont venus au mitan de nous et je les prions de garder de nous in bon souvenir.

Buvons éne chinchée à l’association amicale des Anciens élèves du Lycée d'Angers.

Un Quincéen.

3° Région de Tiercé

Chers PAREGEAUX,

Nous v’ià anuit teurtous réunis en mouceaux pour fêter le centenaire de nout’ école. Nous v’ià toute eune guerrouée et teurtous ben dérigohiés, tellement j’sommes ben aises de nous rasserrer enteur nous.

R’gardez var un brin ! J’sommes teurtous égaillés en bise et en galarne. J’traveuchons chacun à nout’ amain et annuit ren n’aurait pu nous bourder de venir à toute c’te funéraille.

Nout’ compatriote Chevreul, qu’était dru comme eine vieille souche d’umeau, aurait ben assez vécu pour var 1806 et 1906 ; et vantié ben queuque-z-uns d’nos queniaux aux cheveux si ben gueillonnés, s’raient ben en l’cas d’var 2006 ; mais j’cré qu’ c’est ben râle. Ouéy’vous, à c’t’heure, sans nous alouser ni nous mépriser, la jeunesse d’anuit est moins forieuse que dans les temps de c’te gent si savante ; tous les queniaux ont l’air un brin quérée, mais faut pas crére que s’ils ont la goule nuble et point rougeaude, que le cœur n’est point à gré. Ah ! dame non ; j’l’ avons tertous franc comme l’ousier et n’saurait nous bourder de ben faire.

J’avons eu à matin comme vous avez ben pu le var teurtous eune finie belle cérémonie, toute la junesse était vrai ben diri et de ressiée elle était côre ben pu heureuse, parsonne ne sorgnait.

Toutes les grousses légumes de nout’ ville nous avaient honorés de leur présence ; jusqu’à M. le Recteur qu’é venu de Rennes d’eune hardise ! et point par un trop beau temps. Le fait est que dans c’té saison il est toujous ben gandilleux ; on craint toujous des ouzées ; le vent est toujou fouré dret dans le nid à la piée.

Et pis j’avons eu de biaux discours ; faut êteur vrai ben renarê pour aller quérir tous ces rimiaux, et si ben les dégoiser. Et la musique, en avons-nous eu eune teriolée ! oh ! é n’a guère bourde ! de la musique militaire et pis des artisses qu’ont chanté et joué de la pibole, dit des racontars... Et vous créyez ! on se serait cru en paradis.

De c’t’affaire, tout le monde avait pouillé son plus beau fait, et, de soir, j’avons eune fameuse pension, un vrai bon nourrit, ren que du fait ben gouleyant, et qui vaut mieux que d’aucuns piochons dont j’ai entendu parler, et qui vous fourrent le cours de ventre. Et des vins ! Ah ! mâtin ! y a de que en éteur étourdélis, les berlots vous en berluettent.

Comme je devons éteur ben reconnaissants de toutes ces peuves d’amiquié qu’on nous a données!... J’avons jusqu’anuit fait de nout’ mieux pour soutenir dignement le drapeau du Lycée qui porte le nom de l’illustre David d’Angers. Faudra essayer de faire cor mieux et tâchons de ne point trouver sur nout’ va des bateleux qui nous fassent aller à d'zamain.

Un Angevin pur sang.



Glossaire étymologique et historique des parlers et patois de l'AnjouDeuxième partieDialogues, récits, contes et nouvelles en patois, pages 372 à 374, discours en patois angevin prononcé par M. Verrier à l'occasion du banquet du centenaire du lycée David-d'Angers en 1906.